Retours sur les attentats de Bruxelles


Nous sommes dans le brouillard. Il n’y a plus aujourd’hui au niveau de notre exécutif et des services qui le représentent de compréhension stratégique de la menace djihadiste.

Ce brouillard est accentué à la fois par le « bruit » assourdissant des pseudos experts (Président de tel observatoire ou de tel institut, dont ils sont le seul membre et qui ne produisent rien d’autre que leur propre parole se contredisant chaque jour…) et par le pouvoir politique (majorité comme opposition) qui à chaque nouvelle attaque et nouvel attentat tente de nous « bricoler » une nouvelle mesure sortie d’une boîte à idées à l’évidence trouée… Quand la panique côtoie la stupidité et l’indécence.

Avant de donner des réponses, il conviendrait de se poser les (bonnes) questions (gênantes). Je n’en ferai pas ici la liste, par pudeur mais aussi par lassitude… Je me contenterai de redire une nouvelle et énième fois, qu’il nous faut d’abord impérativement comprendre la menace et ne pas refuser la recherche de cette compréhension (PM) sous des prétextes fallacieux.

Ensuite ne pas craindre la réalité. Dès lors, ne pas tomber ni dans le déni (dormez tranquille braves gens tout va bien, aucune faille – ou nouvelle formule : la cellule est quasiment détruite), ni dans les postures martiales (la guerre, la guerre, la guerre), ni dans l’exploitation des peurs (tremblez pauvres gens, la menace est chaque jour plus grande et imminente). Être dans la mesure et la maîtrise ; dans la prudence de l’analyse froide, qui permettra de faire face au défi posé.

Les attentats de Bruxelles ne sont pas une vengeance de l’arrestation d’Abdelslam, mais l’arrestation d’Abdelslam a précipité l’action. Les attentats de Bruxelles sont donc précipités mais tout autant planifiés et coordonnés ; même si le ciblage peut avoir été modifié dans la précipitation et ne correspondrait pas au ciblage initial.

Réelle capacité d’anticipation / planification des cellules terroristes. Affirmation d’une capacité de frappe de l’EI avec une latitude donnée aux cellules. Capacité à monter des équipes sur le sol européen. En parallèle, à titre d’information, les retours de djihadistes sur territoire UE ont fortement augmenté.

Le volet extérieur (les attentats hors son territoire socle) de l’EI n’a aucun lien avec le volet intérieur (Syrie/Irak). Les deux volets sont déconnectés militairement. Malgré ce qui est dit et affirmé par les uns et les autres, à mon sens, les attentats (Paris et Bruxelles) ne signifient absolument pas un affaiblissement de l’EI sur son volet intérieur.

Arrêtons de les prendre pour des fous furieux, le djihadisme a un sens pour ceux qui l’adoptent. La solution est politique (offre/projet/vision politique) et géopolitique. Ils ne combattent pas prioritairement nos valeurs, mais se battent pour un avenir. Pas de formule magique du djihadisme, comme pas de profil type du djihadiste. C’est un parcours personnel. A la fois au départ et au retour. Alors forcément, cela complique et cela rebute certains de chercher à comprendre…

Garder la tête froide et mesurons nos propos comme nos actes. Frapper en Libye, en Syrie, en Irak ne réduira pas la menace. Stopper nos frappes en Irak et en Syrie, stopper nos actions ailleurs n’empêcheront pas de nouveaux attentats. EI a décidé d’exporter son combat. Les équipes sont constituées en Europe et frappent chez nous.

Il faut donc s’attendre à d’autres attentats opportunistes. Si nous parlons uniquement de EI, nous faisons face à un proto-état qui utilise le terrorisme comme moyen d’action parmi d’autres moyens, et qui a structuré sur notre territoire européen son action lui permettant de passer à l’offensive et de prendre l’initiative. Il nous faut être résilient face à une stratégie de harcèlement (stratégie différente d’Al-Qaeda qui était dans le symbolisme). Notons toutefois à la fois un émiettement extérieur et un développement de « franchisés » à l’instar d’Al-Qaeda.

Mais, un changement d’échelle dans l’action terroriste s’est opéré : nous n’avons pas un seul ennemi face à nous mais une multitude. Comprendre aussi que nous ne sommes pas en guerre. Un discours martial ne change pas la réalité. Seule l’intelligence le peut…

NE RIEN COMPRENDRE OU LA STRATEGIE DE LA GESTICULATION


« Pour [les djihadistes] il ne peut y avoir aucune explication qui vaille. Car expliquer, c’est déjà vouloir un peu excuser » (Valls le 09 janvier 2015), puis « j’en ai assez de ceux qui cherchent en permanence des excuses ou des explications sociologiques ou culturelles à ce qui s’est passé » (Valls, toujours, le 26 novembre 2015)…
L’exécutif a choisi, volontairement, consciemment, et politiquement (en la définissant comme ligne politique), de ne pas vouloir chercher à comprendre et expliquer les événements en assimilant par avance toute démarche de compréhension à une culture de l’excuse déresponsabilisante… Nous sommes très loin de la vision du décideur politique de Raymond Aron et de sa capacité essentielle à « honorer ses traites »…
S’interdire de comprendre et de « penser » son ennemi, c’est faire correspondre dans un tout global simplificateur les champs d’opérations, les lignes géographiques, culturelles, religieuses comme historiques et refuser de comprendre que nous ne sommes pas en phase de décomposition du Moyen-Orient (phase commencée en 1979 et achevée en 2011) mais en phase de recomposition, dans lequel l’Etat Islamique promeut la création / développement d’un nouvel ordre.
Découle aussi de là, l’incapacité à comprendre et analyser les objectifs stratégiques de l’Etat Islamique comme de se projeter et à anticiper les suites de ces objectifs : tôt ou tard, Al-Baghdadi devra défier le royaume saoudien. De même, découle de là l’incapacité de comprendre l’asymétrie de sens que les actions de l’Etat islamique produit, tant en interne qu’en externe ; et qui permet à la fois l’extension de son influence et son enracinement territorial.
Ne pas vouloir comprendre son ennemi, c’est aussi s’interdire (ou se restreindre à) la compréhension de ses objectifs ; donc restreindre ses choix stratégiques à de simples bombardements périphériques, que l’on déclare intensifier aux grés des prises de paroles publiques, en espérant des jours meilleurs…. et c’est malheureusement aussi confondre le point de vue de l’ennemi avec celui des autres acteurs (partenaires, alliés, adversaires, …) comme avec le sien. De ce fait, découle la multiplication des théâtres d’engagements et le risque de se créer de nouveaux ennemis. En ce sens, refuser de connaître et comprendre un ennemi, c’est se condamner à ne pouvoir le vaincre ; et ce même si vaincre dans un premier temps consiste à survivre stratégiquement, c’est-à-dire à tenir la position et contenir son ennemi.
Ni recherche de compréhension, ni même d’ailleurs recherche d’explication… Déni du projet politique de l’Etat Islamique, déni de la réalité de l’ensemble de ses actions réduites à de simples actes terroristes, déni de son rapport aux territoires qu’il contrôle, déni de son rapport à l’Histoire des Hommes et du monde, déni de sa filiation à des valeurs sacrées et à des croyances (religieuses ou pas), déni de la part d’ombre du pouvoir, déni de trajectoires historiques différentes, déni de la guerre même et de sa réalité…, déni, déni, déni…
Mais plus encore ; au mieux sans en prendre conscience, au pire en toute conscience ; c’est avouer se soumettre individuellement (le responsable politique qu’est le Premier Ministre avec de tels propos) et collectivement (la Nation qu’il prétend diriger/incarner) aux circonstances.
En réalité, pour notre exécutif, il s’agit d’exploiter politiquement un phénomène et ces conséquences plutôt que de le traiter et le résoudre. Cette logique du déni du savoir permet toutes les manipulations idéologiques, et notamment plus prosaïquement de faire passer des vessies pour des lanternes…

A se placer sur le plan du quotidien, on est vite périmé…


Sans doute la photo du garçon rendu par les flots est dramatique, et son impact émotionnel bouscule les classes exécutives européennes et françaises…. Et l’émotion devient politique. Depuis des mois la question lancinante des migrants – leur nombre, leurs naufrages dramatiques, les causes de leur départ – étalait aux yeux du monde l’absence de vision politique claire sur les événements en cours. Mais il est brutalement devenu impossible de fuir la réalité, le corps sans vie de ce petit garçon mort après tant d’autres, l’a signifié sans détour.

Politique intérieure avec les tweets et les déclarations d’indignation (PM, NKM, AJ, …dans une surenchère médiatique malsaine) ; politique extérieure avec une stratégie de la compassion ! Comme le dit Pascal Bruckner, la compassion c’est ce qui reste à une Nation quand elle a renoncé à tout le reste !!!!
L’émotion n’est que le paravent à notre faiblesse, notre renoncement, notre lâcheté (dans l’ordre : France / UE / Occident).

Une question : L’Europe est-elle (oui ou non) responsable de la mort de ce garçon ? Plus que les centaines de morts en Méditerranée des années passées ? Si nous sommes responsables et que nous voulons éviter à nouveau ce drame, une solution : un pont aérien et maritime pour aller les chercher et les transporter….. La réponse démontre immédiatement la puérilité du raisonnement.

Les solutions fleurissent en fonction des micros : quotas (ils ne régleront rien, diviseront les européens et constitueront un appel d’air supplémentaire), hot-spots (PM –cela doit sans doute faire « moderne »), campements d’accueil (PR – où ? quels pays ? combien ? ), rétablissement des frontières intérieures (à quoi cela servira ?– cf Hongrie), tris des réfugiés (PR), renforcer Frontex et créer un corps de garde-frontières européens (AJ) ; … La parole publique française est devenue totalement erratique, incompréhensible…. C’est un naufrage complet ! A se placer sur le plan du quotidien, on est vite périmé…

Nos politiques se lamentent sur Bachar El Assad mais oublient Issayas Affeworki (Erythrée) ou Omar Bashir (Soudan – et qui fait pourtant l’objet d’un mandat de la CPI). On veut frapper Daech que l’on devrait nommer impérativement Etat Islamique pour bien nommer l’ennemi (donc le comprendre) mais on se refuse à frapper Al-Nosra….

Il est tentant de faire de la lutte contre Daech ou contre Bachar l’Alpha et l’Omega de toute politique au PMO, mais cela ne résoudra rien ! Avec Daech, nous avons un projet politique (totalitaire, international et moderne). Ce n’est pas une organisation terroriste. Daech est une authentique force politique pratiquant à l’occasion le terrorisme.

Le Proche et Moyen-Orient n’est pas en décomposition. Il est en recomposition (ce qui n’est pas la même chose). Entendre l’exécutif français avoir comme ligne de mire le rétablissement des pouvoirs et des territoires hérités des accords Sykes-Picot (1916) démontre une incompréhension totale des événements. Situation identique en Libye, et dans une moindre mesure au Mali.

Honnêtement, que l’on intervienne ou pas, je ne suis absolument pas certain que cela fasse une grande différence au plan stratégique, tant l’absence de vision est patente.

Faire des missions de reconnaissance et ensuite des frappes aériennes en Syrie pour ne pas subir d’attentat (en filigramme ce que dit le PR dans sa conférence) ? Mais depuis un an, Daech subit des frappes aériennes…. Envisager des frappes aériennes en Syrie contre EI ne changera rien. Comme la loi sur le renseignement ne sert à rien ! Nous sommes dans la gesticulation… non vis-à-vis de nos alliés, mais de notre opinion publique. Il s’agit de montrer que l’on agit, que l’on décide…faute de savoir quoi faire.

Parce que nous n’avons pas de stratégie, pas de vision politique claire, notre exécutif lance des actions improvisées ; habiles manœuvres de communication voulant nous montrer qu’il y a quelqu’un à la barre…. La France a cessé d’être gouvernée. L’Europe est tétanisée.

Une campagne aérienne seule (reconnaissances + frappes) ne pourra détruire Daech. Pour détruire Daech, il faudra la conjonction d’une campagne aérienne (qui rend la concentration des forces adversaires difficile) et une offensive terrestre (qui attaque puissamment les forces adversaires dispersées).
Oui, en théorie, la destruction de Daech par une campagne militaire est possible : elle demandera au minimum 40 000 à 60 000 hommes fortement équipés, des mois de préparation et de mise en place. Les spécialistes militaires parlent d’un coût quotidien de l’ordre de 20 à 40 millions d’euros. Sur le champ de bataille, nous aurons face à nous des troupes entrainées, techniquement et tactiquement habiles, et fortement motivées. Les actions de Daech seront certainement décentralisées, s’organisant en essaim avec une volonté de faire des pertes (nos gouvernements y sont sensibles de crainte des opinions).
Nous devrons donc nous emparer méthodiquement de chaque localité et point d’appui dans un temps long. Aucune armée arabe n’est en capacité de faire cela. Seule, l’armée Française non plus.
La France a aujourd’hui une posture d’arrogance, car nous n’avons plus, ni les moyens financiers, ni militaires de notre posture. En fait, sans les américains, personne ne peut intervenir !

Une fois Daech détruit militairement, il faudra contrôler, sécuriser puis stabiliser le terrain tout en étant en capacité de poursuivre les groupes éventuels (et il y en aura)…. Le temps s’allonge à plusieurs mois, vraisemblablement plusieurs années…. Et pour la phase de stabilisation, les problématiques se démultiplient : les forces auxiliaires (Kurdes, milices chiites, tribus sunnites, …) et les forces « gouvernementales » qui auront aidées à l’offensive terrestre, s’opposeront les unes aux autres et s’opposeront toutes à nos forces.

Il nous faut reprendre l’initiative et renouer avec une véritable politique extérieure. Depuis 1976 (refus de la France de maintenir la protection des minorités d’orient), nous avons abondamment trahis nos engagements, multipliés les erreurs et les incohérences (cf Shah, cf Khomeiny, Cf Saoudiens, cf OLP, Cf Turquie, Cf Algérie, Cf Serbie, Cf les dictateurs arabes de Moubarak à Ben Ali en passant par Saddam Hussein ou Kadhafi sans omettre Hafez puis Bachar El Assad, cf Poutine).
Le Quai d’Orsay ne cesse de définir une politique diplomatique incohérente et la justifie sur la « morale » (laquelle ? la nôtre ? donc automatiquement la meilleure car par définition à portée universelle).
Retrouver alors la confiance (dans le temps long) de nos interlocuteurs vis-à-vis de nos intérêts, de nos ambitions, de nos initiatives.

Quelle stratégie ? note rédigée le 22 août pour un responsable politique


Quelques points importants :

– Le plus dur est devant nous. L’Etat Islamique (E.I) a décentralisé à l’extrême les cellules qui peuvent être désormais individuelles

– D’autres actions comparables sont à redouter. Avec l’attaque du Thalys, nous avons eu de la chance. Statistiquement, en raison du nombre croissant de volontaires prêts à s’en prendre à des cibles sur notre territoire, il est malheureusement fatal qu’un jour, un ou plusieurs tireurs, réussissent leurs missions.

– Ne pas se focaliser sur les détails mais se concentrer sur l’essentiel : nous ne faisons pas la guerre à des terroristes mais à un (des) groupe(s) pratiquant notamment le terrorisme.

– Nous ne devons pas céder à l’émotion ; même si elle est légitime.

– Être stupéfait aux dernières actions commises sur notre territoire, comme sur la violence déployée en Irak et en Syrie par E.I, c’est d’abord être ignorant du monde qui nous entoure et de l’histoire de l’humanité.
Décalage important entre une vision « occidentalo-centrée » (omniprésente dans nos sociétés et nos médias) et la vie réelle de la grande majorité de l’humanité.

– De ce fait, ces responsables tentent d’expliquer par des approximations et explications pathologiques les événements voulant masquer leurs incapacités à penser la violence intrinsèque du monde. De ce fait, nous montrons d’abord et avant tout notre propre faiblesse.

– De même notre exécutif (et nombres de responsables politique de droite, cf Ciotti, Etrosi ou Juppé) semblent incapables de relier entre eux les événements : on se félicite des révolutions arabes, puis on se plaint d’une région en décomposition… sans vouloir comprendre que les violences politiques –dont le djihad ne peut être déconnecté – au sein du PMO durant les 50 dernières années sont le signe d’une recomposition géopolitique.

– On fait la guerre pour obtenir un gain politique. Nos adversaires ont un but politique. Nous nous obstinons pour les vaincre de les ramener à la situation qui, justement, les faits nous combattre.

– E.I est bien une force politique. Il convient donc, non de la nier, mais de la comprendre, de la prendre en compte, puis de la traiter comme un ennemi… en lui faisant la guerre afin de lui imposer notre volonté. Mais ce sera dans un temps long. Pas en six mois.

– Nous sommes face à une organisation politique qui pratique notamment le terrorisme. Face à elle, le minimum c’est de nous battre. De mobiliser. De se mobiliser. Tous.

– A contrario des déclarations de notre exécutif sur la guerre en cours contre E.I, notre mode opératoire consiste en réalité à contenir et certainement pas à défaire l’ennemi. Il est illusoire de penser gagner la guerre avec de seuls moyens aériens. Ce faisant, les limites politiques que nous fixons à notre engagement démontrent la réalité et à la hauteur de nos ambitions…

– L’absence de résultats doit nous conduire à réévaluer notre posture et nous amener à définir précisément nos objectifs stratégiques au-delà de péroraisons verbales…
Certes, nous avons pour nous l’efficacité tactique, mais nous payons l’absence de réelle stratégie, en ce sens que nous n’avons aucune vision, aucun projet politique à proposer autre qu’une guerre sans fin.

– 1er objectif : Sécuriser, identifier, neutraliser les individus dangereux sur notre territoire (et hors territoire).
C’est l’essence des missions de nos services depuis de nombreuses décennies. Le terrorisme (quel que soit l’idéologie derrière lequel il se drape) va durer… constat établit dès les années 80 !
Pour ce faire, une politique claire de renseignements et de neutralisation qui n’a pas besoin de nouvelles lois mais de s’inscrire dans la durée (prendre la mesure du temps long)

– 2nd objectif : prendre la mesure des défis extérieurs auxquels nous sommes exposés.
o Pour la première fois, nous sommes engagés militairement simultanément sur plusieurs théâtres d’opérations envers la même mouvance, complexe et protéiforme.
o Comprendre le phénomène et donner du sens. Alors, vouloir peser sur la suite des événements.
o Remettre à plat notre politique de sécurité / défense / diplomatie et anticiper !
o Avoir une vision et un projet politique pour faire émerger une situation différente de celle que nous cherchons à maintenir (accords Sykes-Picot) qui pousse justement nos adversaires à recomposer la zone. (ce qui implique aussi de revoir nos alliances et la vision future de ces dernières…)

Syrie…


La rébellion a sans doute atteint son point culminant. Elle avait réussi à prendre d’importantes portions de territoires, des villes importantes et des points militaires. Mais le régime de Bachar El Assas a tenu et semble désormais reprendre progressivement les pertes consenties. D’abord dans une logique géostratégique avec la reprise de la périphérie de Damas et de l’axe alaouite (axe Damas Méditerranée). En cela, le régime bénéficie d’alliés comme la Russie qui fournit à la fois soutien diplomatique et armes, le Hezbollah et l’Iran (armes, combattants, financements), et même l’Irak devenue nœud logistique de ravitaillement…
Bachar El Assad est en position de force, la reprise de Qousseir est importante dans l’axe géographique sud-nord, mais la reconquête du territoire prendra du temps… Le soutien du Hezbollah pose problème y compris pour le régime syrien… La problématique syrienne n’est pas terminée…y compris par les armes.
Face au pouvoir syrien, la rébellion, déjà fragmentée, se disloque. Au niveau politique, l’opposition au régime de Bachar El Assad n’est pas structurée, fragmentée autour de quatre composantes principales : Opposition démocratique intérieure ayant fait le choix d’une transition négociée ; Opposition islamique dominée par les Frères Musulmans et soutenus par le Qatar, la Turquie, l’Arabie Saoudite (dans un jeu de billard) ; Opposition armée (ASL) elle-même totalement hétéroclite et ne reconnaissant aucune autorité ; Opposition salafiste (djihadiste) soutenus par le Qatar et l’Arabie Saoudite et comprenant des volontaires étrangers.
Voulant jouer les éclaireurs, l’initiative de l’exécutif français d’armer les rebelles syriens en dehors de tout consensus international était troublante. Plus encore celle de vouloir s’immiscer dans une crise sans mandat de l’ONU ni légitimité juridique. Pas même de consensus diplomatique à l’instar de celui sur la Libye. Pire encore, la déclaration française contrevenait aux précédents accords de cet exécutif avec nos partenaires européens…
Les atermoiements, louvoiements, prises de décisions puis rétropédalages de la politique Française produisent des effets catastrophiques. Très clairement des initiatives ont été prises par la France selon des considérations médiatiques (déclaration de la saisie de la SPI par exemple)…
Désormais, les diplomaties américaines, britanniques, françaises, prises à leurs propres pièges, se trouvent dans une situation complexe. En réalité, si nous regardons les atouts de la diplomatie française (entre 2008 et 2010) et notre positionnement depuis 2010 (Ministre des Affaires Etrangères Juppé et Fabius), la France est la grande perdante de la future conférence internationale…
Concernant les armes chimiques, les premières preuves furent fournies il y a plus d’un mois par les britanniques. Cette usage d’armes chimiques pose avant tout un problème politique, car plaçant les Etats-Unis et d’autres pays face à la « ligne rouge » qu’ils avaient eux-mêmes définies en pensant l’avoir placé suffisamment haute pour qu’elle ne soit pas franchie… Toutefois, attention, oui, il y a eu usage de gaz incapacitants comprenant du gaz sarin mais les services français indiquent clairement qu’il s’agit pour le moment d’armes utilisés localement et de manière limitée…

Nous sommes devant un paradoxe stratégique : il n’y a aucun intérêt stratégique et surtout il n’y a pas de manières favorables à intervenir… Mais, ne rien faire aujourd’hui pose un problème de crédibilité politique et stratégique…

LBDSN


En ce jour de commémoration, et avec retard, je voudrais revenir très brièvement sur notre nouveau LBDSN….
La France a donc un nouveau Livre Blanc sur la Défense et la Sécurité Nationale…Plutôt que de vouloir ici analyser en détails son contenu et revenir sur différentes contradictions, tentons de poser quelques interrogations…
Quel sens ? Quel sens dans la réduction des forces ? Quelles missions ? Quid demain ? Quel sens de notre engagement passé en Afghanistan ou présent au Mali ? Redonner du sens mais qu’elle ambition pour la France ? Quelle ambition mais plus encore qu’elle stratégie générale pour la France ? En économie on parle de conquêtes, de territoires à conquérir, de marchés, même de guerre économique….. Mais notre attitude politique et stratégique nie cette réalité conflictuelle dans le domaine stratégique…. Aberrant ! Bref, pour revenir à la terminologie économique ; la seule prise en compte aujourd’hui ; qu’elle est la raison sociale de la France ?
Avons-nous tiré les conclusions de la fin de la guerre froide ? Sommes-nous matures stratégiquement ? C’est à dire en réalité avons-nous la capacité de nous engager dans des opérations militaires tout en assumant la terminologie guerre comme étant l’aboutissement d’une politique ? Le trouble est de faire la guerre sans la nommer… et plus encore de ne point vouloir la nommer dans un LB au profit d’une surabondance de la terminologie crises et menaces… Bref il aurait fallu redéfinir la France et sa place dans le monde, définir une vision mondiale de la France et l’assumer.
La stratégie étant le pont entre le politique et militaire, qu’est-ce que la défense apporte comme moyens outils atouts pour la politique française ? De là nous pourrons définir formats, moyens, et capacités. La France tente de s’aligner sur des puissances symétriques mais sans assumer jusqu’au bout son positionnement stratégique.
La guerre est l’acte suprême de la politique, le nucléaire étant pour certain le sacre !… Or mettre en jeu la vie de soldats et l’accepter / l’assumer est la plus grande crédibilité stratégique. Ce faisant elle renforce aussi la dissuasion nucléaire. L’inverse discrédite à la fois le politique et les forces armées. Les affaires militaires sont exceptionnelles dans une démocratie car elles réfèrent à la vie et à la mort. L’engagement des militaires est donc une marche qui intervient comme expression de notre volonté politique lorsque d’autres marches ont été gravies. La guerre est l’incarnation de la volonté politique. Il ne peut y avoir en la matière d’improvisation stratégique. Ce faisant les militaires ne font pas de la sécurité !

Un moment de vérité


Tous les moteurs économiques s’éteignent les uns après les autres…le ralentissement économique est majeur : -21% en Europe, -14% en Chine; enfin -2,4% aux Etats-Unis…
Dans ce dernier pays, avec un taux de chômage de 7,8% de la population active cela semble aller mieux. En réalité, les chiffres de l’économie américaine sont faussés. Cet été, ce sont près de 600 000 personnes qui ont disparu des statistiques démographiques… et en septembre plus de 800 000… Si nous réintégrons ces personnes dans les statistiques, le taux de chômage monte à près de 15%… Si on y ajoute le temps partiel, on atteint les 20% … De même, il est paradoxal d’entendre les commentateurs nous indiquer une forte hausse de la construction immobilière, mais de constater à l’analyse des statistiques démographiques des personnes travaillant dans le domaine de la dite construction immobilière, qu’il y a stagnation… étrange incohérence… La croissance américaine est faible face à une nécessité (en principe) de réduire les dettes, et la volonté des ménages américains de se désendetter engendrant une forte compression de la demande. D’où une politique de forte création monétaire devant permettre une dépréciation monétaire… Les Etats-Unis fixent donc des priorités claires afin de faire face à ce ralentissement, et pour certains analystes, ce qu’ils nomment le déclin américain… Efforts importants pour améliorer la compétitivité économique, y compris par la baisse des coûts salariaux (les emplois créés sont rémunérés à la baisse, la pauvreté explose et la pauvreté se répand…1 enfant sur 5 est en situation de misère) ; recherche d’énergie à bas coûts ; la FED émet de la dette, la tire dans le temps afin au minimum de la déprécier, puis potentiellement pourrait viser le non remboursement par répudiation si la conjoncture géopolitique internationale lui permet… ; politique de plus en plus protectionniste et isolationniste (« arrêtons de sauver le monde »)…Cependant, d’ici 5 ans les Etats-Unis vont bénéficier dans l’industrie (lourde particulièrement) et dans la chimie d’un fort avantage comparatif par le biais des gaz de schistes…
En Chine, là encore la croissance est actuellement en réalité beaucoup plus faible qu’annoncée officiellement. Tous les indicateurs de croissance (production électrique, consommation d’énergie, transports de marchandises, …) démontrent que les chiffres de croissance du PIB sont faussés. Si la stagnation, voire la récession de différentes économies a une implication directe et indirecte sur l’économie chinoise, la Chine est surtout aujourd’hui confrontée à des problèmes structurels. Le modèle de croissance chinois (exportations massives de produits peu sophistiqués) est remis en cause ; la hausse des coûts salariaux en Chine depuis plusieurs années contraint cette dernière à délocaliser les sites de production, particulièrement en Afrique. Plus encore, la hausse des coûts salariaux a dégradé la compétitivité des entreprises chinoises et étrangères ; d’autant plus que les Chinois privilégient l’épargne et non la consommation de biens. En conséquence, le ralentissement puis la faiblesse de la croissance chinoise risque d’être durable. De ce fait aussi, le ralentissement attendu d’autres économies fortement liées (Australie, Japon, Brics, …), la baisse des prix des matières premières et la hausse des valeurs refuge… La conjonction de la hausse des coûts salariaux et de la perte de profitabilité des grandes entreprises va conduire à une diminution nette de l’emploi ainsi qu’au départ d’entreprises étrangères… et engendre trois interrogations majeures : d’où vont venir les futurs emplois chinois ? Quel modèle de croissance économique ? Quelles conséquences sociales et politiques ? En conclusion, les luttes politiques et les problématiques structurelles (taux d’épargne, typologie de la production manufacturière, absence de protection sociale, bulle immobilière, vieillissement démographique, écarts régionaux, hausse des salaires, revendications sociales, …) sont telles que la Chine va connaître de manière durable un affaiblissement de sa croissance économique, voire une récession ; engendrant une reconfiguration stratégique risquée…
Plus généralement en Asie, tandis que l’économie est moribonde au Japon (qui fera défaut), si quelques pays voient leur croissance continuer de croître (Thaïlande, Malaisie, Indonésie) du fait d’une forte demande intérieure, l’ensemble des pays de la zone connaissent une forte baisse de leur activité économique allant pour certains, déjà, jusqu’à une croissance négative (Taiwan)…
Au Proche et Moyen-Orient, crise financière, segmentation politique, mouvements sociaux mais plus encore situation géopolitique explosives… De nombreux pays ne possèdent plus de marges de manœuvres budgétaires. Les recettes fiscales diminuent notamment du fait des suites du Printemps arabe, des évolutions géopolitiques au levant et une dépendance trop importante au cours du pétrole (l’Iran a besoin d’un cours supérieur à 150 dollars / barils pour équilibrer son budget).
En Amérique Latine, après une période plutôt favorable en 2012 et début 2011, les différents pays connaissent en 2012 un fort ralentissement sans avoir engagé les réformes structurelles nécessaires. De ce fait, la croissance de la zone Amérique Latine sera faible.
Le ralentissement de la croissance mondiale est à la fois désormais général ; aucune zone économique n’y échappe ; et structurel : tous les modèles économiques et sociaux sont à réinventer, du modèle chinois au modèle américain, sans omettre celui de l’UE, ainsi que le fameux modèle social français.
Pour l’Union Européenne et en particulier pour l’ensemble de la zone euro, il y aura une forte récession en 2013…L’Espagne, l’Italie, mais aussi la Grèce, la France sont touchés. La France joue son avenir. Le chômage va croître de l’ordre de 50 000 personnes/mois soit d’ici décembre 2013 près de 700 000 chômeurs de plus. Nouvelle génération que celle dite boomerang, qui doit retourner vivre chez ses parents du fait de la situation économique, que ce soit en Espagne, Italie, Grèce, Portugal, mais aussi France et Etats-Unis… La crise n’est pas finie. Malheureusement, de nombreuses années difficiles sont devant nous… Nous allons assister à un approfondissement de la crise. Nous allons vers une récession grave car nous n’aurons pas de croissance. La croissance française ne sera pas de 0,8% en 2013. Vraisemblablement, nous pouvons estimer une croissance française de l’ordre de – 1% à -1,5%…. Nous allons donc assister à la poursuite des délocalisations des outils de production et désormais sièges sociaux ; à l’acquisition par des intérêts non européens d’entreprises européennes ; à une intensification de la fuite des capitaux et des cerveaux ; et donc à un affaiblissement encore plus conséquent du poids de l’UE et de la France dans le monde.
Comme nous l’indiquions dans un précédent billet, l’euro n’est pas sauvé. Il y a une incompréhension majeure de ce qui se déroule actuellement : l’ajustement économique de la zone euro se fait par appauvrissement alors qu’il y a absence de fédéralisme. La zone euro va vers la dissolution. La Grèce ne pourra pas rembourser. Le défaut approche, et l’effet boule de neige, conduisant à une course à la restructuration des dettes, voir à leurs répudiations… La dernière fois que la France a fait défaut, ce fut en 1787… entraînant impôts (sur la bourgeoisie), convocation d’Etats généraux (pour faire approuver ces impôts), puis…révolution…
De fait, nous assistons à l’échelle occidentale à un déclassement du monde salarial, phénomène qui va s’accélérant et dont la désindustrialisation est un symbole bien avant d’en être la cause. Deux niveaux de consommation apparaissent désormais : le low cost et le high level car la middle class n’existe plus, éradiquée par les politiques. Est-ce la fin de la consommation de masse ? En simultané, se produit un gigantesque transfert de richesses à l’échelle mondiale… Les fondamentaux économiques ne sont plus respectés. Le monde est sous perfusion, le liquide coule mais les prochaines poches sont vides même avec un QE3 illimité.
Ces situations économiques vont déclencher de forts mouvements sociaux, explosions sociales, émeutes, puis troubles politiques et en répercussions des transformations géopolitiques, car en parallèle un déclassement stratégique s’opère…Les Etats-Unis connaissent désormais le doute et la peur du déclin. L’apparition d’un important vote populiste (Tea Party) étant la conséquence d’une désindustrialisation dont les classes moyennes sont les premières victimes. Le sentiment de déclin, plus exactement de perte de terrain face à la Chine que d’aucuns décrivent devant les Etats-Unis dès 2017 nourrit une vision pessimiste… La puissance américaine ; comme celles des vieux pays du continent européen, est remise en cause tant au travers des symboles que dans la réalité géostratégique. Pour les Etats-Unis, se sont de véritables tests qui se déroulent actuellement à l’échelle planétaire (Proche et Moyen-Orient, Asie, …). Lorsque ces tests se clôtureront, ce sont non seulement les alliances mais aussi le cadre de régulation internationale qui sera remis en question. Brutalement. Le monde se prépare à des affrontements stratégiques, ce que réfute les pays du vieux monde, mais ce qu’attestent les ventes d’armes…

L’OTAN, l’Afghanistan et la France


Sur la scène internationale, pour la France, mais aussi l’Alliance, la guerre d’Afghanistan se termine. Le Sommet de Chicago a été en partie consacré à ce sujet, même si la smart défense fut aussi l’un des sujets. La France, et le nouveau Président Français, n’était pas attendu. D’autres rendez-vous internationaux sont plus importants et la France y est d’ores et déjà attendue… Paradoxalement, le Sommet de Chicago était plus important en termes de politique intérieure française, le retrait anticipé français ayant été l’un des points saillants de différenciation entre les deux candidats à l’élection présidentielle. Il s’agissait donc pour notre Président bien d’un test, mais d’abord à jauge nationale, que son intervention télévisée de mardi soir a implicitement reconnue…
L’image du Sommet est sauve. Les positions politiques des uns et des autres se sont exprimées et elles ont été prises en compte très officiellement ; trop même car en réalité bien des divergences diplomatiques se sont faites jour (entre la France et l’Allemagne à la fois sur le pacte budgétaire et le retrait anticipé d’Afghanistan ; entre la France et la Grande-Bretagne sur le pacte et la relation bilatérale de défense). Pour les États-Unis, l’enjeu du Sommet était d’éviter un effet boule de neige portant tout à la fois préjudice à l’Alliance et à la France devenue bouc émissaire de la précipitation d’autres retraits.
59éme engagement du candidat François Hollande : « j’engagerai un retrait immédiat de nos troupes d’Afghanistan. Il n’y aura plus de troupes françaises dans ce pays à la fin de l’année 2012 »… puis glissement stratégique par l’apparition de la terminologie « troupes combattantes » en mars. Ce seront donc les forces combattantes françaises qui quitteront le théâtre afghan d’ici la fin de l’année 2012. Il fallait en finir du mieux possible en Afghanistan, mais quelle terminologie étonnante que celle de « forces combattantes » : l’Afghanistan est une zone de guerre, tous nos soldats sont des combattants et sont d’ailleurs définis comme tels par nos adversaires.
Les affaires militaires sont exceptionnelles dans une démocratie en ce sens qu’elles référent à la vie et à la mort. Mettre en jeu la vie de soldats et l’assumer politiquement est la plus grande crédibilité stratégique d’une nation. L’engagement de militaires est donc une marche qui intervient comme expression de notre volonté politique lorsque d’autres marches ont été gravies. L’outil militaire devient un engagement politico-stratégique dans le sens strict du terme lorsque le Politique le décide, car la guerre est l’incarnation de la volonté politique ; il ne peut y avoir en la matière d’improvisation stratégique. L’inverse discrédite à la fois le Politique et le militaire. Forces combattantes, mot malheureux ; mais est-ce là seulement un mot, ou déjà l’apparition psychologique des maux ?
De fait, différentes questions se posent : quel est le sens de ce que l’on fait de, et dans l’Alliance ? Avons-nous tiré les conclusions de la fin de la Guerre froide ? Quel était le sens de notre engagement en Afghanistan ? Le Président Français venant de déclarer dans son discours de Nijrab que nous n’étions pas « mobilisés pour capter des ressources ou pour avoir une influence », quel sens et quelle ambition pour la France ? Sommes-nous matures stratégiquement ; c’est-à-dire en réalité, avons-nous la capacité de nous engager dans des opérations militaires tout en assumant la terminologie adéquate, y compris le mot guerre, comme l’aboutissement d’une politique ? Et, la stratégie étant le pont entre le politique et le militaire, quelle stratégie pour la France ? Il ne faudrait pas que notre réintégration dans le commandement intégré de l’Alliance se transforme davantage désormais en une résignation à l’impuissance, transformée en fuite en avant, et non en un projet politico-stratégique… La France tente de s’aligner sur des puissances symétriques mais sans assumer jusqu’au bout son positionnement stratégique… En ce sens, la Libye fut-elle la revanche de Suez ?
Nous assistons là, à un délitement du Politique (de l’exécutif d’hier comme de celui d’aujourd’hui), dans son incapacité à accepter un conflit voulu et mené dans le cadre d’une Alliance politique et militaire. Un état de grâce, politique comme stratégique, n’est pas éternel !
Beaucoup de questions donc. Et un constat. Ce retrait, pour ne pas dire retraite, se fait par réaction à la mort de 4 soldats français, tombés en janvier de cette même année. Axe certainement le plus important, celui des hommes et des femmes qui font notre défense, c’est-à-dire notamment ceux, qui sur le champ de bataille, servent la France avec abnégation, et qui se doivent de résoudre par la force et le droit ce que la raison n’est pas parvenue à faire. Mais, ce ne doit jamais être l’aggravation d’une situation sur un théâtre d’opérations, ou une urgence dictée par l’expression d’une émotion, fût-elle collective, électorale ou politique, qui doit justifier un retrait, mais la concrétisation des objectifs politiques et stratégiques. Il nous faut, soit accepter les conséquences de ce que l’on veut faire et obtenir, soit subir les conséquences de ce que l’on n’a pas voulu faire. Et, l’on ne fait jamais la guerre pour rien, encore moins pour le roi de Prusse…
Pour cette guerre d’Afghanistan, il s’est bien agi d’un bourbier, d’une guerre civile dans laquelle nous nous sommes situés avec simplisme dans la vision réductrice « Taliban égal terroriste ». Ce faisant, nous avons fait prendre un risque considérable à l’Alliance. L’engagement en Afghanistan et l’échec, nous donnent en héritage un appareil militaire marqué par une défaite. Le nier serait non seulement nier une évidence mais aussi refuser d’en tirer conséquences et enseignements. On apprend de ses échecs, rarement de ses victoires…
Plus grave, au-delà de ce nombrilisme stratégique Français comme occidental ; pour rapatrier nos hommes et sauver le soldat OTAN ; nous sommes tous – collectivement – prêts à tolérer dans cette zone une instabilité indéfinie avec les risques géopolitiques inhérents ; mais il est vrai, essentiellement d’abord, pour le Pakistan… sans en mesurer exactement (ou vouloir en mesurer) toutes les conséquences… Or, elles seront bien là ! Nous en reparlerons…

Une réponse politique


La réponse est Politique. Uniquement Politique dans la volonté de résoudre en commun les problèmes mais en acceptant les principes de la « génétique stratégique » : une cellule qui grossit trop doit se scinder… Nous avons acheté du temps et nous nous sommes procurés de l’oxygène ; mais les problèmes structurels ne sont en rien réglés…Maintenant commence réellement la transformation de l’Union européenne ; maintenant doit débuter la reprise en main de l’Union européenne ; maintenant se décide la volonté de reprendre nos destins en main de façon autonome.
Soit nous ne sommes pas capables de nous entendre et les pays de l’Union européenne se retrouvent dans une situation identique à celle ante 1648… nouveau moyen-âge européen avec réinvention des nations et idées nationalistes. Si l’euro explose (une chance sur deux pour Attali dans une prise de position digne de nos grands intellectuels…), l’Union européenne implosera engendrant de fait une nouvelle grammaire du monde. Mais si l’euro explose, c’est aussi l’Allemagne qui se trouve exposée et assez largement mise en difficulté. Les excédents de paiement allemand sont nos dettes !
Nous soldons là, l’échec de trente années de politique européenne française et nous risquerions de redécouvrir le problème allemand.
La note même de l’Allemagne pourrait alors être remise en question et dégradée…Le cœur du système européen est désormais attaqué… Mais les artifices, y compris financiers ne suffiront pas, sauf à financer de la défaite, monétaire, financière d’abord, puis stratégique ! L’Union européenne s’est construite depuis 1987 au fil de l’eau sans tenir compte de l’évolution réelle du monde… L’union européenne deviendrait alors enjeu d’une partie de go stratégique entre la Chine et les Etats-Unis, un continent « low cost »….
Soit, nous décidons que nous avons un destin commun et nous avançons ensemble. Si nous nous donnons cette capacité, nous transformons le continent européen comme il ne l’a pas été depuis 1648… L’Union européenne deviendra enfin l’Europe, au sens d’un Etat réel… Fin de l’Europe financière au profit de l’Europe véritable… Fin d’une représentation faciale basée sur un mensonge stratégique au profit de la mise en adéquation d’une réalité stratégique… Là encore, nouvelle grammaire européenne, nouvelle grammaire mondiale, nouvelle géopolitique. La question politique centrale est donc de déterminer si nous sommes capables, ensemble, à près de 400 millions d’individus, de définir un destin commun et de récupérer notre souveraineté, même si elle est européenne.
La solution passe alors par une alliance entre la France et l’Allemagne. Les opinions publiques et les parlements devant y être associés, car est aussi testée actuellement, la solidité des liens entre la France et l’Allemagne. Nos deux pays se doivent aujourd’hui, seuls, d’aller de l’avant ; et d’autant plus que la commission européenne a disparu. Aller de l’avant, dans une intégration plus importante. Si d’autres pays européens décident de suivre, ils doivent accepter sans réserve les règles émises. La France et l’Allemagne représentent plus de la moitié de la puissance européenne, la moitié des droits de vote à la BCE et plus que le PIB de la Chine.
En réalité, nous allons vers une Union européenne, non seulement à plusieurs vitesses mais aussi à plusieurs cercles…