Qui va se substituer à moi pour assurer les risques ?


En France, les marges des entreprises ont peu de chance de s’améliorer, tandis que les investissements sont en panne faute à la pression fiscale, tandis que pour la grande majorité des citoyens la priorité n’est plus d’épargner ou d’investir mais d’échapper à l’impôt ! En parallèle les retraites des systèmes privés (AGIRC ARRCO sont discrètement pillées afin de renflouer les systèmes de retraite publics (IRCANTEC) permettant de sauvegarder les régimes spéciaux).

Nous n’avons plus d’argent donc nous le dépensons sans compter… Notre système économique fonctionne désormais sur la dette.

Le déficit continue de se creuser alors même que notre pays a subi un choc fiscal sans précédent (69 milliards d’euros de prélèvements supplémentaires depuis 2011). L’objectif du déficit budgétaire de 3.6% du PIB en 2014 et de 3% en 2015 ne sera pas tenu. A comparer avec la promesse de FH (comme de NS) d’atteindre celui des 3% dès 2013 ! Nous sommes non seulement hors-jeu mais aussi discrédités…

La France est désormais un partenaire « junior » pour l’Allemagne. Le triangle dominant est UK-ALL-IT chacun défendant ses intérêts. UK fait du chantage sur sa sortie. ALL domine économiquement. Renzi est le socialiste européen qui réussit (pour le moment). La France a le levier de l’international mais ne l’utilise pas ! Sauf peut-être pour faire diversion par rapport à la scène intérieure : intervention à venir en Irak pour « effacer » les affaires Thevenoud, le succès littéraire de la rentrée et le retour de NS. Nous ne faisons plus partie du triangle dominant. Or, les autres pays européens s’agrègent auprès des dominants (Pologne-Allemagne, Tusk-Merkel notamment).

 

En Europe, la production industrielle a progressé de 2.2% en juillet mais uniquement grâce à l’Allemagne (2.4%)… il est amère de constater que l’Euro est devenue un outil déflationniste : hier, l’ajustement se faisait par la valeur de la monnaie (déflation), aujourd’hui, l’ajustement se fait par les salaires ; la baisse des salaires renforce la compétitivité… Certes, c’est la politique qui fut conduite par l’Allemagne.

L’ensemble des politiques économiques mises en place dans les pays européens et visant à renforcer la compétitivité par ajustements salariaux a alors conduit à rompre un cycle potentiel de croissance et a abouti à une impasse économique et budgétaire prévisible (je n’ai de cesse de le dire depuis trois ans) et à amplifier la déflation.

La crise provient de surendettement et de sur liquidités. Les réponses actuelles sont mauvaises car reposants sur une mauvaise allocation de l’épargne.

La déflation est notre horizon. L’inflation est passée en zone euro de 1.3 à 0.3% en un an. Dans différents pays (du Sud), les prix baissent de manière importante (Grèce et Espagne notamment). Or, la déflation induit mécaniquement une spirale dangereuse : baisse de l’activité (notamment par report des dépenses), baisse de la croissance (déjà nulle), augmentation de la dette et du coût de la dette (Grèce : recul du PIB de 20% et hausse de 25% du poids de la dette). Pour le bien de l’Europe, il faut que l’Allemagne aille moins bien !

 

En Allemagne, les données sont impressionnantes : faible chômage, profitabilité des entreprises, diminution du déficit public, augmentation des exportations et donc de l’excédent extérieur, augmentation des revenus par tête et stabilisation des inégalités (qui ne sont pas plus importantes du reste de la zone euro). A terme le vieillissement démographique allemand va modifier ce constat et notamment sur deux points immédiats : le taux d’épargne des ménages et le potentiel de croissance (faible : 0.4%).

Plus encore, la faiblesse de l’Allemagne dans les nouvelles technologies du fait des investissements importants dans le niveau de gamme de sa production dégraderont son commerce extérieur et entraineront des pertes de parts de marché vis-à-vis de nouveaux concurrents émergents. Mais il s’agit d’un modèle économique non duplicable car reposant sur un fort excédent commercial alors même qu’il est structurellement impossible à tous les pays européens d’être simultanément dans la même position. L’Allemagne est un passager clandestin pour le reste des pays européens. Ses solutions ne sont pas transposables.

 

Au Portugal, l’Etat est en faillite mais personne ne veut le reconnaitre, lui permettant de s’endetter à nouveau pour renflouer une banque. Or, les banques européennes étaient définies par l’ensemble des politiques européens comme saines et le système monétaire européen comme sain et sauf… Notre modèle européen dérive : les contribuables deviennent les seuls responsables de tous…

 

Il est sidérant de voir des responsables politiques dénoncer les risques de déflation tout en menant des politiques économiques déflationnistes. Pire, ces mêmes responsables réclament aujourd’hui des mesures d’assouplissement monétaire de la part de la BCE ; une drogue apaisante ; sans mesurer (ou vouloir mesurer) les conséquences de ces mesures ni même les travers du système monétaire mis en place. Mario Draghi est parfait dans son rôle mais n’a pas les moyens de transmettre des impacts dans l’économie réelle.

Les politiques d’assouplissement monétaire (en réalité, des politiques d’impression monétaire) ont partout échoués. Même la FED le reconnaît dans son rapport publié début septembre.

 

Au Japon, les revenus continuent de diminuer (c’est une constante économique japonaise depuis plus d’une décennie).

Le cas japonais est exemplaire à plusieurs titres car il est aussi structurel tandis qu’en face les responsables politiques ne cessent de pratiquer la même politique économique (nous en sommes à la 9ème politique d’impression monétaire) avec un leitmotiv : « cela ne marche pas mais cela finira par marcher » !

La Banque centrale japonaise ne peut plus désormais financer le déficit japonais car l’épargne japonaise est devenue insuffisante tandis que les investisseurs étrangers refusent de prêter au Japon (endettement à hauteur de 240 % de PIB). Donc, pour faire face, le Japon imprime des billets. Et certains en France et en Europe nous parlent de « modèle japonais » en nous exhortant à suivre sa politique.

Comprenons bien, la politique monétaire japonaise n’est pas une politique choisie mais une politique subie. A défaut le Japon sera en faillite car ne pouvant financer son déficit public. Le Japon est entré dans un cycle d’effondrement de la devise et d’hyperinflation violente avec pour conséquence à terme la cessation de paiement. Or, le Japon est la 3ème économie mondiale. Les conséquences économiques seront majeures.

 

Aux Etats-Unis, pas de croissance des revenus mais une reprise du crédit. De là, l’actuel reprise de croissance économique (1 à 1.8%), mais avec un nouveau problème de « qualité » du crédit, d’autant plus qu’un crédit est une dette soit pour investir soit pour consommer…. La bulle des crédits étudiants (student loans) risque d’éclater du fait de leur fort caractère subprime ; les actifs des entreprises sont nettement surévaluer (multiple supérieur à celui de 2007 et identique à celui d’octobre 1929 !) ; l’effet richesse ne cesse d’augmenter (l’enrichissement des ménages les plus riches impactes positivement la croissance, mais toute correction boursière entrainerait mécaniquement une récession).

La balance des exportations hors commerce extérieur se creuse. Certes les stocks ont baissé et réalisent à eux seuls pour près de 1.5% de croissance. Le déficit budgétaire américain ne se résorbe pas : de septembre 2013 à septembre 2014, 1 000 milliards de dettes supplémentaires aux Etats-Unis.

Plus encore, avec une croissance de 1.8% pour 2014, cela équivaut à 900 milliards de dollars de croissance de PIB pour une injection de 5 000 milliards de dollars dans leur économie. Ce qui signifie que pour 5 dollars de dettes, il y a 1 dollar de PIB !

Pire, là aussi les inégalités se creusent comme l’a démontré Thomas Piketty puis la FED. Si la crise financière avait permis une légère contraction des inégalités, ces dernières ont augmentés depuis 2010 : la part des richesses détenues par les 3% des américains est passée de 51.8% à 54.4% entre 2007 et 2013 (+2.6), tandis que celle de 90% des américains est passée de 33.2% en 1989 à 24.7% en 2013 (- 8.5) !

La macro économie n’est que l’agrégation des comportements économiques micro, c’est-à-dire individuel… On voit partout les revenus baissés et un chômage de masse atteignant des proportions hallucinantes et certains espèrent une croissance forte…. Tandis que certains interprètent les paroles de Yelen ou de Draghi, ou la parité euro-dollar, comme hier on interprétait les astres…. Certes, les économistes ont été inventés pour que les astrologues aient l’air sérieux, mais restons sérieux et constatons surtout le manque de conviction de tous les acteurs économiques et la recherche effrénée de justifications.

En réalité, depuis les années 80 en France et au Japon ; les années 90 aux Etats-Unis et en Europe, les années 2000 en Chine ; le dynamisme économique s’est fortement érodé. Refusant ce constat pour des raisons diverses (et radicalement différentes selon les zones), les responsables politiques ont décidé de stimuler l’économie de manière artificielle (politique de taux d’intérêt bas et politique d’assouplissement monétaire).

Du refus de ce constat, nombres d’erreurs ont été réalisées et notamment celle de la croyance en un redémarrage économique facile. Nous naviguons à vue…. Personne ne veut prendre la mesure du phénomène en cours depuis plus de 20 ans dans le monde….

Mais plus encore que le refus du constat, personne n’a voulu affronter la double origine de cet affaiblissement : le privilège commercial accordé en 2000 à la Chine par son entrée dans l’OMC et le vieillissement démographique de nos populations. Une population vieillissante réclame une monnaie forte afin de lutter contre l’inflation (l’inflation diminue les rentes). Lorsqu’une population vieillit démographiquement, elle devient rentière (par diminution du nombre de « producteurs ») et préfère détruire sa compétitivité (y compris à l’export) au profit du maintien de sa rente. De ce fait, il est sidérant de voir le gouvernement français s’attaquer à la seule politique française efficace que constitue notre politique familiale !!

Ce que nous observons actuellement dans le monde entier (stagnation-baisse des salaires, montée des inégalités, augmentation du capital) traduit un dysfonctionnement du système politique qui ne parvient plus à rendre les « marchés » concurrentiels encourageant les dysfonctionnements.

 

Qui va se substituer à moi pour assurer les risques ?