XI JINPING : tenir la maison sur le fil du rasoir


Le Parti communiste chinois s’est donc prononcé en faveur de la levée de la limite constitutionnelle de deux mandats pour celui qui fait déjà figure d’hyper-président, Xi Jinping, âgé de 64 ans. La convocation du Comité Central est totalement inédite (troisième plenum en moins de deux mois) avec de nombreux changements constitutionnels prévus au-delà de cette réforme des mandats présidentiels. Nécessité pour Xi Jinping de montrer son pouvoir face à un Comité Central dans lequel il est certes majoritaire mais de manière limitée. Il y a des oppositions à Xi Jinping, notamment dans le cadre des « vieux » militaires.

Est-il en train de consolider son pouvoir du fait d’une très grande puissance face à des freins certains et des capacités à s’opposer à lui ; ou assiste-t-on à une tentative désespérée pour regrouper tous les pouvoirs afin d’y rester ?

Depuis fin 2012 et son arrivée à la tête du Parti Communiste Chinois (PCC), Xi Jinping a rencontré de nombreuses difficultés : il a dû créer différentes commissions au sein du Comité central pour reprendre les rênes, il a dû mener une campagne anti-corruption large (plus d’un million de personnes poursuivis et écartés) pour reprendre le contrôle de certaines directions du parti et de l’Etat, … Le chemin de Xi Jinping fut difficile et il rencontra beaucoup de résistance sur son parcours politique, non pas dans la société chinoise (même s’il existe de réelles interrogations politiques au sein de la jeunesse chinoise et des aspirations sociales fortes, volonté de richesse), mais de la part de groupes d’intérêts au sein du parti même. Pays immense avec des pouvoirs locaux pouvant être forts et en capacités de « freiner » les réformes en fonction de leurs intérêts personnels et locaux. Or, l’un des enjeux fondamentaux pour Xi Jinping (exprimé dans de nombreux discours et dans ces deux livres) et le maintien/survie du PCC (ne pas toucher trop au système politique chinois) alors même que son propre programme de réformes est extrêmement ambitieux.

Le message de Xi Jinping est donc aujourd’hui de poursuivre « jusqu’au bout » les réformes entreprises…à l’horizon de son 80éme anniversaire (2032/2033) ; le nombre de mandats étant vu comme un obstacle « artificiel » sur le chemin de la stabilité et grandeur chinoise. La Chine à le culte du long terme et de la stabilité par peur du chaos (cyclique dans son histoire -chaos qui amène les puissances étrangères) et de l’immobilisme.

La décision de levée la limite constitutionnelle de deux mandats accentue donc en Chine, comme dans d’autres pays (Russie, Turquie, Arabie Saoudite, etc., voire les Etats-Unis…) le système de l’homme fort (souvent providentiel), nouveau leader « mondial » (Xi Jinping, Trump, Erdogan, MBS, Poutine, … et Emmanuel Macron) avec une perte totale des valeurs occidentales (contre-pouvoirs, élections libres, système libéral, etc…). Différents pays, dont la Chine, proclament haut et forts, ne pas vouloir devenir un pays « occidental » tout en favorisant chacun leur propre prosélytisme.

La Chine, toujours comme d’autres pays (Etats-Unis, Russie, Turquie, Iran, Arabie Saoudite, Grande-Bretagne, etc..), se cherche donc un nouveau modèle (à rapprocher du monde anglo-saxon qui avec le Brexit et l’élection de Trump fait sécession et rompt avec le modèle anglo-saxon originel). Déjà dit, mais répétons-le, ce que nous nommons pudiquement régime autoritaire aujourd’hui, nous risquons de le nommer bonne gouvernance demain…

Xi Jinping et ses proches conseillers sont (à raison) dans une conscience de crise. Ils sont persuadés, et Xi Jinping le premier, que la Chine rentre dans un contexte de crise ; conscience de l’entrée de la Chine et du monde dans une zone de turbulence existentielle.

A l’intérieur, car le pays nécessite des réformes difficiles (mise sous tutelle de différentes entreprises financières et industrielles, dettes des gouvernements locaux, entreprises d’Etat, etc…). Volonté établie de transformer radicalement l’économie du pays (PIB par habitant qui place la Chine au 70éme rang mondial alors que la Chine est la seconde économie mondiale), nécessité d’augmenter significativement la productivité (qui assure la hausse du niveau de vie) face à un net ralentissement de la croissance structurelle, en contrepoint des automatiques augmentation/levée de capital (la dette des entreprises privées en Chine atteint aujourd’hui les 200% du PIB) pour assurer la stabilité sociale interne. Le défi est donc de « nourrir » les espoirs de la jeunesse (niveau de vie avec une sortie de la pauvreté de près de 600 millions de chinois) face à la difficulté de « délivrer » l’économie (en arrêtant les injonctions massives de capital. De là, toujours aussi un besoin du monde extérieur (technologies – la moitié de l’investissement privé va à des innovations de rupture) et des Etats-Unis. Effets structurels et effets temporels s’affrontent et se renforcent paradoxalement.

Les dirigeants chinois sont pour autant relativement confiants dans la réussite de leur pays, comme de leur régime et système politique. Le déterminant, sont les réformes actuellement menées dans le domaine financier et industriel.

A l’extérieur, car la situation géopolitique change, tout particulièrement avec les Etats-Unis. Mondialisation qui n’est plus dirigée, tensions géopolitiques fortes… Ajoutons Taiwan (ambition personnelle de Xi Jinping de réunir les deux Chines), la Corée du Nord, les Paracels, Spratleys et Senkaku/Diaoyu, la nouvelle route de la soie (1 000 milliards de dollars d’investissement avec une vision 2049 !), la projection vers l’Afrique et l’Amérique Latine, réaction face à la projection des Etats-Unis vers l’Asie, lecture géostratégique face au Japon, à l’Australie, etc…

Conscience de crise toujours… Le contexte international est celui de crises à venir dans lesquels se cristallisent aussi la volonté d’affirmer le leadership chinois, dans une vraie stratégie, celle du long terme. Il est vrai que la lecture politique française se focalise et se projette dans un horizon de temps de 5 ans… Plus encore, nous (Européens et particulièrement les Français) sommes dans l’idéologie avec les Chinois à défaut d’être dans le pragmatisme (nos projets, nos règles, nos intérêts).

Mais en parallèle, pour la Chine, peur ou crainte d’étendre trop ses ambitions face à sa réalité géostratégique (monde multipolaire avec une logique multilatérale – « la communauté de destin de l’humanité »- remise en cause par la vision américaine d’un monde hétéropolaire avec des logiques bilatérales) dans une aspiration à un co-leadership mondial avec les Etats-Unis. Et nous ? La Chine ne « connaît » pas l’Union Européenne qu’elle restreint dans un cadre uniquement bilatéral.

Les Chinois veulent « redessiner » leur monde et le monde. Et les dirigeants chinois ont besoin de temps pour mener leurs réformes (en Chine, comme ailleurs, notamment en France), et ce dans une période de cristallisation géopolitique…

Besoin de temps, besoin d’autorité. Sorte de marche sur le fil du rasoir.

Réformes, budget et horizon


Le budget Français a été validé par Junkers à Bruxelles. Forme de blanc-seing… Euréka.
La France n’est pas Malte ou le Portugal… (sic). Nous (nous collectif représentant la France) allons valider deux années sous les 3% de déficit public nous permettant de sortir de la procédure de déficit excessif et nous procurant plus de marge de manœuvres dans les temps à venir. Gros souci à venir sur le CICE (20 + 20 milliards à trouver). Donc bonne nouvelle.

De fait, nous sommes entre gens polis et bien élevés. Certes, comme le dit Junkers, la France n’a pas sa place dans la procédure de déficit excessif, mais pour des raisons politiques, et ce afin de rééquilibrer le pouvoir en Europe (face à l’Allemagne). De fait, la dynamique de désintégration / éclatement de l’Union européenne se poursuit de manière douce et furtive, sans émotion. L’Autriche vient de basculer dans le camp des pays d’Europe centrale en opposition frontale avec la conception européenne traditionnelle (Europe de l’Ouest), y compris vis-à-vis des Allemands. Nous allons, au mieux, vers plusieurs Union européenne. Au pire : implosion et recomposition.

En regardant simplement au-delà au niveau économique, quelle lecture prospective ?

Notre budget ne va pas dans le bon sens, et pire, de manière évidente. Premier point, le plus important : le déficit de l’Etat augmente passant de 69 milliards en 2016 à 83 milliards d’euros pour 2018. Second point, la dépense publique augmente à nouveau en volume de 0.7%… On supprime 1600 emplois avec un objectif de 120 000 suppressions sur le quinquennat et les projections du Président Français. Et, de l’aveu même de nos dirigeants, notre déficit structurel reste à l’identique.

La croissance économique actuelle masque ces faits et notre situation reste relative… En Europe, l’Allemagne devrait se maintenir avec une croissance stable. Mais pas dans les autres pays : France, Italie, Espagne… Certes, en apparence, les chiffres économiques s’améliorent avec une croissance de 1.7%. Mais, cela reste un point en dessous de la croissance de 2007. Les prévisions pour 2018 sont inférieures à celle de 2017. Et celles de 2019 sont encore plus basses. Nous sommes à un « pic » de croissance, qui relativement n’est pas extraordinaire. Nous étions avant 2007 sous une moyenne tendancielle de 2.7% de croissance (contre 1.7% pour 2017 année considérée comme particulièrement bonne). La croissance va rechuter en 2018 et plus encore en 2019, nous ramenant en face de nos difficultés et de nos contradictions.
Triste réalité, la France n’a plus d’argent. Mais nous le masquons habilement. De la bonne communication à la Castagner : bref de la pub de lessive.
Nous pourrions faire un parallèle avec la Catalogne : pourquoi cette volonté de partir de l’Espagne alors même que tous les experts ne cessent de die que tout va mieux en Espagne. Idem pour l’Italie du Nord et l’Italie du Sud. Osons un parallèle géopolitique avec la courbe de Laffer : un ras-le-bol fiscal engendrant des conséquences géopolitiques : la solidarité ne fait plus recette.
Le chômage est-il en baisse ? Malheureusement pas. La perte d’un point de chômage vient simplement de la croissance de la population active. Certes, il ne faut pas confondre demandeurs d’emploi et chômeurs, mais si le taux de chômage baisse c’est essentiellement parce que la population active augmente plus vite. Ce qui pour autant ne remet pas en cause le fait qu’il y ait de la création d’emploi. Mais à quel coût ? (et pour quels résultats ?).

L’horizon de temps, est plutôt de 5 à 7 ans. En réalité, Emmanuel Macron se lie les mains à la conjoncture économique. Si la conjoncture économique est bonne d’ici 18 à 24 mois, on dira que Macron cela fonctionne. Si la conjoncture se retourne, on dira que Macron a échoué.

Pendant ce temps les indices boursiers « actions » continuent de battre des records, y compris en période de tension géopolitique, sans volatilité, démontrant bien leurs décorrélations totales avec la réalité. Plus encore, les enquêtes d’opinions économiques auprès des chefs d’entreprises sont bonnes, tandis que les chiffres économiques sont en réalité mauvais. Mais les marchés ne prennent en compte que les enquêtes d’opinions économiques dans une sorte d’euphorie béate. Réalité boursière totalement artificielle. Communication boursière. Communication financière. Communication économique. Communication politique. Les communications se rejoignent dans un attendu tragique : la fin prévisible est écrite et sera tragique.
De fait, les marchés boursiers ne montent que par les créations de liquidités des banques centrales, atteignant aujourd’hui dans le monde entier les plus hauts historiques. Ainsi l’indice de Shiller est plus haut aujourd’hui qu’il ne l’était avant la crise de 1929. Nous ne sommes pas encore sortis de la crise de 2008-2009. Nous sommes dans une bulle boursière. Et comme toute bulle, elle ne se dégonfle pas, elle explose…

Hurler avec les loups pour qu’ils ne vous dévorent pas


Nous sommes à la fin d’un cycle électoral de plus de neuf mois. Fin novembre 2016, avec le triomphe de François Fillon, gagnant des primaires, la droite est certaine de sa prochaine victoire aux Présidentielles et aux législatives qui s’en suivront. On connaît la suite… Jusqu’à la victoire de Emmanuel Macron à la Présidentielle, la (re)-naissance jupitérienne, la victoire de la République En Marche aux élections législatives, et l’adoubement-couronnement médiatique.

Deux analyses peuvent être portées. La première, Emmanuel Macron est un sauveur (celle des médias, des éditorialistes, etc…) et nous sommes sur la voie du redressement national. L’euphorie, le culte de la personnalité (Emmanuel Macron), la purification des mœurs politiques (avant d’autres ?), le parti de la raison, du modernisme et de la vérité, l’enrégimentement des cerveaux en sont les caractéristiques principales ; comme l’exclusion de tous les libres penseurs (Delamarche, Godin, Polony, Brighelli, Taddei…) face à ceux qui s’auto-proclament (enfin) éclairés et avant-garde… Une démocratie de l’émotion médiatique jouant politiquement sur l’invention-désignation d’un ennemi (une classe politique corrompue versus la vertu politique) permettant une approche-fantasme d’émancipation politique. Une méthode et une démarche somme toute calquée sur celle de Podemos. Avec une question de philosophie politique : quand on définit qu’il n’y a qu’une seule voie politique possible, quelles bascules risque-t-on ?
La seconde, est celle du désordre et du chaos : une France qui navigue entre euphories, indifférences, angoisses, extrémismes, hystéries, obsessions (actuellement celle de la vertu), boucs-émissaires et frondes. Une démocratie française à la dérive avec comme révélateur un taux d’abstention record faisant craindre selon les mots d’un éditorialiste « une démocratie sans le peuple » …
Mais ces deux analyses, c’est aussi deux peuples pour un seul pays, deux peuples pour une seule nation ; ce que certains ont schématisé dans la France d’en haut versus la France d’en bas. Schéma que nous retrouvons aussi en Grande-Bretagne comme aux Etats-Unis, et qui a conduit notamment à l’élection de Donald Trump. Il y a une solide tradition démocratique aux Etats-Unis. Mais, il ne faut pas, pour autant, croire que la démocratie américaine est égalitaire. Tout comme la nôtre. Les classes moyennes ont éclatées, sont « reprolétarisées » et se sentent mises en danger par la mondialisation. La remise en question du libre-échange, de la mondialisation, de l’échelle économique supranational, est commune tant à Bernie Sanders, Trump, Marine Le Pen, ou encore Jean-Luc Mélenchon. Et il s’agit là, à mon sens et à tout le moins pour les Etats-Unis et le monde anglo-saxon, d’une évolution de fond, rationnelle et raisonnable. Or, en France, nous méconnaissons le protectionnisme. Nous ne le comprenons pas pour ce qu’il est : une méthode de régulation non-hostile au marché.
Oui, les élites ont trahi le peuple, c’est certain. Et le peuple, les peuples (dans le sens qu’il existe désormais plusieurs peuples au sein de chaque pays, au sein de chaque nation) se vengent, pensant être meilleur. On rejoint là, la pensée de Jean-Luc Mélenchon et de la France Insoumise ou le peuple serait moralement (la vertu encore) supérieur. Ce qui est tout aussi faux.

Trois axes politiques sont donc à prendre en compte : l’axe droite/gauche, affaibli certes mais qui continue d’exister ; l’axe vieux/neuf qui malgré toute présentation médiatique voulant le définir comme novateur est simplement cyclique ; l’axe contre le système/corriger le système qui tend à recouvrir extrêmes/non-extrêmes. Ainsi, si une opposition non extrême ne s’impose pas, lors d’une seconde phase de « dégagisme », seuls les deux extrémismes de gauche (FI) et de droite (FN) le feront, profitant alors d’une décomposition politique totale.
De ce fait, pour l’emporter demain, le FN de l’union des droites, celui de Marion Marechal Le Pen, visera à se poser en choix de civilisation, reprenant à son compte des questions comme la souveraineté, l’identité nationale, mais aussi un programme économique basé sur la valeur travail, la méritocratie et le volontarisme politique…
Mais un quatrième axe est apparu : européiste/non européiste (ce que je nomme européiste est la peur de la non-Europe, voir pour certains la peur de la non-mondialisation). Or, cet axe recouvre aussi la segmentation entre ceux qui vivant « bien » veulent profiter de tous les attributs de la mondialisation, quitte à se ghettoïser socialement et ceux qui veulent juste survivre économiquement. Le corps électoral qui a remporté la Présidentielle (au 1er tour avec Hamon, Macron, Fillon comme au second tour avec Macon) est un corps électoral marqué par le conservatisme européen et l’européisme. Pour les Français ce n’est pas la revanche de l’histoire, mais le souhait non avoué de ne plus en faire partie. A l’inverse, pour l’Allemagne il s’agit d’une fenêtre d’opportunité : l’Union européenne comme instrument de la puissance allemande. Et là, force est de constater une confusion entre identité et souveraineté. Confusion qui a introduit des points de focalisation souvent mal interprétés.
En apparence, le rejet des partis comme des catégories/clivages traditionnels notamment droite/gauche est là. Nous sommes dans une phase de décomposition. Les sociologues peuvent parfois la nommer aussi destituante, permettant d’opposer deux signifiants aussi vides l’un que l’autre mais leur donnant une identité propre : En Marche pour qui tout est discours et les Autres. Ainsi, à titre illustratif, nos politiques, à force de ne cesser de le modeler pour tous les usages, ont fait du Gaullisme un signifiant vide, c’est-à-dire que tout responsable politique peut s’en revendiquer pour finalement y mettre n’importe quoi. N’importe qui. N’importe quoi.
De là aussi, logiquement un mouvement d’extrême-gauche et un mouvement d’extrême-droite ; toutes deux contre le système et s’intellectualisant l’un l’autre réciproquement, tandis que les autres partis se positionnent en faveur de corriger les excès du système.
Mais, et là nous touchons le primordial, nous sommes dans des mouvements tactiques et non stratégique ; nous sommes dans le court-terme, non dans le long terme. De là aussi, l’usage par les dé-constituants de choses abstraites à même de mobiliser le corps électoral, refusant toute thématique pouvant faire perdre des voix ; la construction réelle du programme n’intervenant qu’une fois les élections clairement gagnées.
Au-delà, et malgré toute la rhétorique médiatique, le réel conserve ses droits. Si seule l’obsession de vertu catalyse les pensées et les discours ; la France depuis 2015 connaît le terrorisme islamiste et vit sous la menace de nouveaux attentats djihadiste, une situation internationale chaotique, près de 5 millions de chômeurs, l’exclusion, la remise en cause de la cohésion sociale, la pauvreté, le communautarisme, l’insécurité quotidienne (qui n’est pas que physique), les inégalités, etc… Ces (tristes et brutales) réalités s’imposeront à nouveau politiquement très vite. L’on peut censurer la réalité, mais jamais, la faire disparaitre.

Deux options sont dès lors possible : la réussite ou la crise de régime. Robespierre n’est pas loin…

Penser l’impensable : le fait national-libéral


Ci-après une note rédigée en décembre 2016 suite à la victoire de Donald Trump pour un service gouvernemental Français.

Imprévisible élection de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis comme l’était l’imprévisible Brexit ! Imprévisible pour tous ceux qui refusent de penser l’impensable…
Lire une analyse et découvrir que le Brexit comme l’élection de Trump « ne se peut » car elle fait « figure de scandale » en dit long sur l’incompréhension du mouvement de fond et le refus de regarder en face la nouvelle réalité du monde. Pétrification idéologique, pétrification stratégique, qui conduisent à refuser le constat que dressait l’ambassadeur de France dans un tweet « tout est désormais possible » …
Trump et son entourage inquiètent… Certains analystes n’hésitent pas à décrier « la brutalité » du nouveau dirigeant, sa « violence verbale dans nos démocraties réglées », ou encore sa « dangereuse inculture » … Refusant cette réalité élective, ils espèrent d’abord un rejet de son élection par les grands électeurs, puis souhaiteront un impeachment… Les mêmes décrivent un « phénomène politique interne isolé » oubliant que si Trump remporte l’élection présidentielle américaine, la lame de fond électorale lui offre tout autant le Congrès (le Sénat et la Chambre des représentants), et, plus important encore, la Cour suprême.
Plutôt que de poursuivre les descriptions et jugements sommaires sur Trump, son style, sa coupe de cheveux, son équipe de campagne ou son entourage ; nous devrions nous interroger sur les raisons qui ont conduits tant les électeurs britanniques à produire le Brexit et les électeurs américains à produire Trump… car les deux phénomènes ont les mêmes origines et leurs conséquences géostratégiques sont de prime importance ; puis de là, tenter de nous projeter dans un avenir.

Une rupture du monde s’est produite en novembre 1989. La chute du mur de Berlin constitue, de manière symbolique mais aussi géopolitique, le début d’une période de transition. Un nouveau monde n’est pas né en 1991 au travers de l’affirmation d’un nouvel ordre mondial, ni même le 11 septembre 2001 ; car malgré les déclarations péremptoires, les démocraties n’ont pas changé le monde ! Bien, étonnamment, en 2016 avec la conjugaison du Brexit et de l’élection de Trump, se produit la rupture stratégique.
Depuis 1688 (Glorious Revolution), le monde anglo-saxon « fait » (détermine) le jeu mondial. Or, et c’est bien là l’important, les bouleversements se déroulent au cœur de ce monde anglo-saxon. Britanniques et américains ont rompu le consensus. Le Brexit, comme l’élection de Trump, c’est dire et affirmer vouloir faire autrement, et donc annonciateurs d’autres bouleversements. De là aussi, stratégiquement, la réaffirmation de l’Etat territorial. Une forme d’impérialisme américain d’un côté (forme d’Hégémon), recentrage national et retrait du monde de l’autre. Ce qui se traduit immédiatement dans les représentations américaines en matière de politique étrangère.
2008 fut l’année d’une prise en compte, le début d’une révolution et l’aube d’une dynamique. Celle, non plus de davantage d’interdépendance mais de plus de souveraineté. Révolution car les opinions anglo-saxonnes, hyper-individualistes, redécouvrent soudainement et profondément les vertus du « collectif ». En ce sens, aussi, quête culturelle identitaire et recherche de « valeurs traditionnelles » face à la globalisation. La dynamique remet en cause ce que les américains nomment « le consensus de Washington » et elle pose un constat : l’Etat-Nation, pour l’Occident comme pour son cœur qu’est le monde anglo-saxon, apporte des bénéfices que la mondialisation, non seulement ne peut apporter, mais désormais détruit.
Pétrification économique qui consiste à accumuler des richesses et du capital, non pas pour utiliser ces richesses et ce capital, mais à unique fin d’accumulation ; aboutissant par là à une pétrification sociale et à un élargissement entre possédants et non-possédants. Même pétrification dans notre modèle social français tant vanté, qui ne protège que les protégés et laisse dans le froid et sur le chemin des milliers (millions ?) de nos concitoyens précarisés et figés dans le non-emploi/vie précaire (précariat).
Le modèle anglo-saxon bouge car il ne fonctionne plus pour le plus grand nombre. Dénonciation du libre-échange, volonté de protéger et de défendre sa population, affirmation territoriale y compris dans la dimension « frontière » … En ce sens, révolution / transition américaine et britannique en cours, mais aussi (re)découverte de ce qui se joue sur le continent européen avec l’Allemagne et la Russie, et un basculement vers le fait national.

La victoire de Trump vient de la contestation du libre-échange qui détruit le peuple américain (les classes moyennes) ; une victoire qui surgit du cœur blanc de la démocratie américaine (démocratie blanche qui constate son déclassement démographique à terme) souffrant de la violence de la mondialisation. Trump a défini les maux ET la réalité américaine, du moins vécue par une part considérable de la population américaine (classes moyennes et classes dites populaires) : celle d’un quotidien déplorable issu d’une mondialisation et globalisation détruisant l’intérieur de la société américaine.
Obama laisse son pays dans un état catastrophique. Le rêve américain ? Oui, mais loin de l’être pour tous les américains pour lesquels les indicateurs socio-économiques exposent à la vue de tous (années 2010-2016) une nette dégradation du niveau de vie. Comme le démontre Olivier Delamarche, ce sont près de 102 millions d’américains qui sont sans emploi ; plus de 50 millions qui se nourrissent avec les bons d’aide alimentaire et 33% des américains qui sont désormais incapables de subvenir normalement à leurs besoins alimentaires ; ce sont près de 20% des jeunes adultes qui vivent chez leurs parents/grands-parents faute de pouvoir se loger ; c’est une mortalité en hausse dans la population blanche pour la tranche 45/54 ans ; … Le compromis socio-économique n’est plus tenu…
Ce malaise dans les classes moyennes et populaires (désormais affublées du terme « populistes ») conduit politiquement à une pression démocratique sur des sociétés qui ne sont déjà plus des sociétés démocratiques ; conséquence directe de la disqualification du Politique et de la démocratie représentative (démocratie twitter avec Trump ?). La démocratie, directe ou indirecte, n’est pas un régime de compétences ; tant au niveau des électeurs que des responsables et dirigeants politiques ; d’où son besoin impérieux d’une élite. En France, aussi sidérant que cela puisse être, celui qui se définit comme issu du corps des élites et qui entend répondre aux effets de la mondialisation et des souffrances engendrées, se nomme Emmanuel Macron. Curieuse campagne de fait que la campagne présidentielle française qui s’annonce, où François Fillon entend représenter l’antisystème, Jean-Luc Mélenchon veut abandonner le bruit et la fureur révolutionnaire, et Emmanuel Macron propose la révolution.
La situation américaine (interne comme externe) sera compliquée avec ou sans Trump, au regard du montant des dettes (niveau économique) et des détenteurs de cette dette (niveau géopolitique). Actuellement les Chinois vendent de la dette américaine, et les Japonais, derniers serviteurs zélés de l’Hégémon américain, achètent cette même dette, soit 1 070 milliards de dettes américaines supplémentaires entre le 31 décembre 2015 et 31 décembre 2016. Et la politique économique de Trump vise à augmenter cette dette…
Donald Trump indiquait clairement, dès avril 2016, que sa priorité serait désormais « l’Amérique d’abord ». Pour lui comme pour les Britanniques, forme de refondation et de recherche d’un développement autonome se recomposant autour de fondamentaux traditionnels.
Trump n’est pas en guerre contre le libéralisme économique. Theresa May, Xi Jinping et Vladimir Poutine sont sur la même ligne. Ne pas confondre libre-échangisme économique et interdépendance. Etablir des barrières tarifaires, des frontières économiques ou migratoires, des politiques protectionnistes, limiter la circulation des personnes et du capital, autant de mesures qui appartiennent aussi à la pensée économique libérale, et nous ramènent aux origines mêmes du développement économique du monde anglo-saxon. La remise en cause des accords d’échange sera donc une suite logique. Trump, de par sa personnalité, va favoriser des négociations bilatérales commerciales, dans une forme de diplomatie du deal, qui viseront d’abord à permettre un phénomène de réindustrialisation et de recentrage économique. Deal économique, deal commercial, deal géopolitique, …

Aussi surprenant que cela puisse paraitre, l’effet Brexit et l’effet Trump conduisent à un constat majeur : la question allemande va redevenir d’actualité. Mais de nombreuses questions restent en suspens et particulièrement celle de l’Euro/gouvernement de la zone euro. Et, là, certes les événements à venir au sein de la zone euro seront contraignants, mais plus encore l’attitude allemande.
De fait, au sein de l’Union européenne, devant l’abandon Français (la France est tétanisée par le vertige du déclassement), l’Allemagne visera à imposer ses intérêts économiques et géopolitiques avec davantage d’indépendance (et moins d’interdépendance), tant vis-à-vis de la France que de l’Union européenne ; ce que Steinmeeir à l’été 2016 annonçait déjà en indiquant que l’Allemagne se devait d’agir politiquement et économiquement « éventuellement avec l’Union » face aux puissances mondiales (signifiant par là-même en contrepoint sa volonté d’agir sans l’Union).
Le fait national allemand, c’est tout autant sa prise de contrôle économique et commerciale, sa toute-puissance monétaire au travers de l’euro, que dans un autre domaine sa politique migratoire. La question allemande que nous (re)découvrons, et qui ne va avoir de cesse de se développer pour les deux décennies à venir, devrait nous conduire à nous interroger profondément sur le devenir de notre relation avec la Grande-Bretagne.
Le Brexit n’est pas un souci économique pour les Britanniques mais un problème politique pour les pays européens, signifiant en terme politique une volonté de retour au peuple, en matière monétaire une nécessaire donc prévisible chute de l’euro, et en terme territorial comme stratégique, une Union européenne qui devra impérativement se modifier/corriger si elle souhaite perdurer (ce qui n’est pas acquis).
Vladimir Poutine en Russie, Trump aux Etats-Unis, Xi Jinping en Chine, mais aussi Angela Merkel en Allemagne et Theresa May en Grande-Bretagne, doivent nous amener à regarder le monde réel. Volonté du peuple américain de se désengager du monde, pas de ses dirigeants traditionnels (Clinton versus Trump). Volonté britannique de recouvrer sa liberté envers une bureaucratie bruxelloise jugée bien trop contraignante. Volonté russe de recouvrer une puissance malmenée depuis 25 ans, volonté allemande de se réaffirmer nationalement, volonté chinoise de restaurer l’Empire du milieu…

En laissant faire cette dérive stratégique qui nous isole doublement (isolement stratégique face à la Grande-Bretagne et isolement stratégique face à l’Allemagne), la France a bel et bien perdu (provisoirement ?) la main stratégique. Sommes-nous dans l’aveuglement ? Ce double choc a eu lieu. Il faut le regarder comme tel et non pas le nier. Or, de nombreux analystes et dirigeants politiques tentent de croire dans une illusion qui leur convient alors que nous sommes en train d’assister à la fin du système occidental. Il faut d’urgence accepter la réalité, fut-elle impensable. Faute de quoi, nous serions, nous Français, en train de quitter l’histoire !

JE SUIS GAULOIS


Surpris par la polémique des origines gauloises des Français, « Ecœuré par les effets tangibles de la sotte querelle », comme se le plaisait à dire l’historien Pierre Chaunu, je voudrais dire qu’avant toute chose, pour moi, la France est une idée.
La France que je parcoure, c’est une terre labourée par l’histoire et les hommes, c’est des paysages, des couleurs, des saveurs, des villages, des régions, des reliefs, des cours d’eau ; tous différents mais tous parcelle de France…
La France, c’est au travers d’une histoire religieuse, le paganisme comme la Chrétienté ; France fille aînée de l’Eglise comme il plaît de le rappeler, avec des histoires et des géographies différentes mais toutes liées dans une destinée commune. C’est aussi, pratiquants ou pas, croyants ou non croyants, un héritage culturel ancré au plus profond de notre terroir à l’instar des crèches de Noël, si semblables mais si intrinsèquement différentes…
La France, c’est des familles, des clans, des peuples venus de différents horizons, à différentes époques, brassés par une volonté farouche, celle d’être là, sur cette terre si particulière, parce que notre. C’est ensuite, seulement ensuite, un peuple et une nation. Nation que l’on invente tardivement d’abord face aux autres, puis avec les autres, par une autorité politique, un Etat, qui sur bien des points est certes particulier, mais à l’image de son territoire et de ceux qui l’anime…
La France c’est des chefs, des seigneuries, un royaume puis une république, mais aussi des solidarités comme des jacqueries, des rassemblements comme des frondes, des massacres, des vengeances, des hontes, des honneurs, des oublis et des pardons…
La France, c’est une histoire riche de plusieurs millénaires, une terre façonnée par des hommes qui laissent en héritage ici des dolmens, là des cathédrales, des monuments romains, des grottes, des beffrois, des lagons, des chemins, des châteaux et place-forte, des salines, des cités, des bassins miniers, des ports, des vignobles, …
La France c’est des vivants mais aussi des morts. Nombreux morts qui ont parsemé la terre de France au long de l’histoire, qui font de notre terre une particularité : « les Français ont sous leurs pieds le sol qui contient, proportionnellement aux vivants, le plus grand nombre de morts »
La France c’est tant de choses, et tant d’autres choses encore…. Mais c’est surtout « le passé et l’avenir, le vertige de l’avant et celui de l’après ».
Être Gaulois, ce n’est non pas venir d’ancêtres gaulois ; c’est simplement vouloir être une parcelle de France, de sa terre comme de son histoire. La France est un idéal et pour moi une fierté.
Je suis si peu gaulois de mes origines, comme tant et tant… mais je suis pleinement gaulois.

Retours sur les attentats de Bruxelles


Nous sommes dans le brouillard. Il n’y a plus aujourd’hui au niveau de notre exécutif et des services qui le représentent de compréhension stratégique de la menace djihadiste.

Ce brouillard est accentué à la fois par le « bruit » assourdissant des pseudos experts (Président de tel observatoire ou de tel institut, dont ils sont le seul membre et qui ne produisent rien d’autre que leur propre parole se contredisant chaque jour…) et par le pouvoir politique (majorité comme opposition) qui à chaque nouvelle attaque et nouvel attentat tente de nous « bricoler » une nouvelle mesure sortie d’une boîte à idées à l’évidence trouée… Quand la panique côtoie la stupidité et l’indécence.

Avant de donner des réponses, il conviendrait de se poser les (bonnes) questions (gênantes). Je n’en ferai pas ici la liste, par pudeur mais aussi par lassitude… Je me contenterai de redire une nouvelle et énième fois, qu’il nous faut d’abord impérativement comprendre la menace et ne pas refuser la recherche de cette compréhension (PM) sous des prétextes fallacieux.

Ensuite ne pas craindre la réalité. Dès lors, ne pas tomber ni dans le déni (dormez tranquille braves gens tout va bien, aucune faille – ou nouvelle formule : la cellule est quasiment détruite), ni dans les postures martiales (la guerre, la guerre, la guerre), ni dans l’exploitation des peurs (tremblez pauvres gens, la menace est chaque jour plus grande et imminente). Être dans la mesure et la maîtrise ; dans la prudence de l’analyse froide, qui permettra de faire face au défi posé.

Les attentats de Bruxelles ne sont pas une vengeance de l’arrestation d’Abdelslam, mais l’arrestation d’Abdelslam a précipité l’action. Les attentats de Bruxelles sont donc précipités mais tout autant planifiés et coordonnés ; même si le ciblage peut avoir été modifié dans la précipitation et ne correspondrait pas au ciblage initial.

Réelle capacité d’anticipation / planification des cellules terroristes. Affirmation d’une capacité de frappe de l’EI avec une latitude donnée aux cellules. Capacité à monter des équipes sur le sol européen. En parallèle, à titre d’information, les retours de djihadistes sur territoire UE ont fortement augmenté.

Le volet extérieur (les attentats hors son territoire socle) de l’EI n’a aucun lien avec le volet intérieur (Syrie/Irak). Les deux volets sont déconnectés militairement. Malgré ce qui est dit et affirmé par les uns et les autres, à mon sens, les attentats (Paris et Bruxelles) ne signifient absolument pas un affaiblissement de l’EI sur son volet intérieur.

Arrêtons de les prendre pour des fous furieux, le djihadisme a un sens pour ceux qui l’adoptent. La solution est politique (offre/projet/vision politique) et géopolitique. Ils ne combattent pas prioritairement nos valeurs, mais se battent pour un avenir. Pas de formule magique du djihadisme, comme pas de profil type du djihadiste. C’est un parcours personnel. A la fois au départ et au retour. Alors forcément, cela complique et cela rebute certains de chercher à comprendre…

Garder la tête froide et mesurons nos propos comme nos actes. Frapper en Libye, en Syrie, en Irak ne réduira pas la menace. Stopper nos frappes en Irak et en Syrie, stopper nos actions ailleurs n’empêcheront pas de nouveaux attentats. EI a décidé d’exporter son combat. Les équipes sont constituées en Europe et frappent chez nous.

Il faut donc s’attendre à d’autres attentats opportunistes. Si nous parlons uniquement de EI, nous faisons face à un proto-état qui utilise le terrorisme comme moyen d’action parmi d’autres moyens, et qui a structuré sur notre territoire européen son action lui permettant de passer à l’offensive et de prendre l’initiative. Il nous faut être résilient face à une stratégie de harcèlement (stratégie différente d’Al-Qaeda qui était dans le symbolisme). Notons toutefois à la fois un émiettement extérieur et un développement de « franchisés » à l’instar d’Al-Qaeda.

Mais, un changement d’échelle dans l’action terroriste s’est opéré : nous n’avons pas un seul ennemi face à nous mais une multitude. Comprendre aussi que nous ne sommes pas en guerre. Un discours martial ne change pas la réalité. Seule l’intelligence le peut…

Syrie et PMO


L’élargissement des vols de reconnaissance de la France dans ce qui semble désormais faire office de stratégie française, constitue d’abord et avant tout une réponse à l’opinion publique française. Il en est de même des premières frappes des forces aériennes françaises en Syrie, visant avant tout à affirmer une posture présidentielle française face à Vladimir Poutine et Barak Obama à New-York de crainte d’être désormais isolé… Sorte de volonté présidentielle de se hisser sur un strapontin à la table de négociations après quatre années d’errements moralisateurs par le biais de postures et terminologies martiale….
Des négociations ont lieu depuis plusieurs mois puis se sont intensifiés ces dernières semaines entre Américains, Iraniens et Russes sur la suite à donner. Les Russes veulent éviter l’effondrement de l’Etat Syrien et trouver une sortie « honorable » à Bachar. De là, depuis mai 2015 des entretiens bilatéraux entre Russes et Américains, puis élargies aux Iraniens (en bi puis trilatérale).
La personne de Bachar El-Assad est le point de fixation. Les atermoiements sur Bachar sont contre-productifs. La question n’est pas l’avenir de Bachar Al-Assad. Pactisez ou pas n’est pas la question. Personne ne conteste la réalité de Bachar Al-Assad et de son régime. Nous sommes dans un système complexe. La question est de trouver une solution politique. Introduire une dimension personnelle sur Bachar dans notre politique extérieure est (était) une erreur grave, aux conséquences funestes. Pour rappel à certains de nos politiques qui nous expliquent la « faute morale » à vouloir discuter avec Bachar, les propos de Churchill au début de la Seconde Guerre Mondiale, évoquant une alliance avec le diable si Hitler envahissait l’enfer…
En parallèle de ces premières initiatives diplomatiques, Vladimir Poutine a graduellement déployé des forces en Russie, mettant les autres puissances devant le fait accompli et ne reconnaissant son implication qu’à ce stade… Politique du fait accompli qui est la marque de Poutine depuis 2008, et qui après le Caucase du Sud, puis la Crimée, s’imbrique au sein du Proche et Moyen-Orient montrant ainsi la volonté russe de s’impliquer à nouveau dans les questions de cette zone. Certes, d’abord par le constat de la réalité du terrain, renforcé par le fait que les iraniens ont indiqué à la Russie ne plus être en mesure à reprendre le contrôle de certaines positions comme à protéger Bachar (entretien entre des responsables russes et iraniens de la Brigade Al-Qods). Mais, de manière plus profonde, rien de moins qu’un changement majeur dans les relations internationales, équivalent (effet boomerang ?) de son éviction de la scène internationale en 1991… Juste retour du balancier pour les russes… Mais, de fait, une période de transition s’achève, un nouveau monde est en train de naître….
A ce stade, et en Syrie, la Russie ne cherche pas à s’opposer frontalement aux puissances occidentales, mais cherche plus intelligemment à devenir le « leader » de la coalition anti-E.I et le garant d’une solution. Une coalition concentrée sur cet adversaire et non pas Bachar Al-Assad dans laquelle il veut amener les américains à définir avec lui les opérations à venir. C’est l’arrière-plan de sa position et de son discours.
Et cette habile manœuvre diplomatique n’a pas attirée que la Syrie et l’Iran. L’Arabie Saoudite depuis plusieurs mois a des entretiens réguliers avec la Russie tout comme l’Egypte ou encore la Jordanie. Le Premier Ministre Israélien a eu des entretiens avec Vladimir Poutine (dans une volonté de montrer son agacement vis-à-vis de la politique américaine mais aussi une nécessité de « coordonner » techniquement les opérations entre les deux pays puisqu’était présent outre le Premier Ministre, le chef des renseignements militaires ainsi que le Chef d’Etat-major de le Tsahal), suivi peu après par la Turquie. L’Allemagne a eu des entretiens discrets avec les russes sur le sujet, tout comme Kerry… Petit à petit donc, les européens et les américains s’alignent sur la position russe : simple principe de réalité ?
Un principe de réalité que nous n’aurions jamais dû omettre. La stratégie française en Syrie est en échec depuis quatre ans car en décalage profond avec les événements. Elle risque de l’être encore en partie au regard du décalage entre les déclarations stratégiques (nous voulons la destruction de l’E.I) et des moyens (frappes aériennes).
Et, il est tout autant « surprenant » d’entendre nombres de nos responsables politiques constater que nos frappes ont des effets limitées et/ou marginales ; qu’elles ne nous préservent pas du risque d’attentats terroristes contre nos intérêts (sur notre territoire ou à l’extérieur) ; qu’elles ne réduisent pas l’attrait au djihad de nombres de nos jeunes ; qu’elles ne nous procurent pas une place centrale mais une place marginale au sein des négociations diplomatiques ; etc… Serait-ce là une « surprise » pour eux ?
Au-delà, considérant les multiples déclarations de ces mêmes responsables politiques de droite comme de gauche demandant une intervention militaire contre l’E.I (avec des variantes burlesques) ; pour l’essentiel et à une notable exception, ce sont les mêmes politiques qui depuis 1981 n’ont eu de cesse, exécutif par exécutif, de mettre à mal l’armée française. Personne n’assume les conséquences de ces décisions passées et une contradiction majeure : les armées françaises n’ont plus les moyens des ambitions du pays, tandis que nombres de responsables souhaitent leurs assigner un engagement militaire hors de proportion… constat douloureux de personnels politique dégrisés.
Or, devant l’émotion des opinions publiques ; la confusion gagne conduisant nos responsables politiques effarés à vouloir fondre les problèmes en un seul : terrorisme, migrants, E.I ; et à décider de nouvelles phases d’opérations sans aucune perspective de solution pour l’après E.I. faute d’appréhender la complexité de la situation. Mais la virilité de la posture politique l’impose !
Sur le terrain, tout est fragmenté. Les acteurs sont multiples (plus de 2 000 katibas sur le terrain), les alliances diverses, variées et fluctuantes… tous les acteurs y compris régionaux ont des intérêts contradictoires, impliquant des ambiguïtés et des double-jeux politiques. Dans le viseur la Turquie, mais aussi les monarchies du Golfe….
E.I a une stratégie. Vladimir Poutine a une stratégie. La France n’a pas de stratégie. Le Président Français nous indique vouloir lancer une offensive sur Daech (qu’il conviendrait de nommer E.I) afin de « réduire la menace terroriste » (avec l’invocation de l’article 51 de la Charte des Nations unies), est-ce à dire que les frappes aériennes de la coalition depuis un an n’ont produit aucun effet ? Donc, est-ce à dire que notre stratégie initiale était fausse ou incomplète ? Est-ce à dire que nous allons frapper aussi au Yémen contre AQPA (responsable d’attentat contre la France) ? Est-ce à dire que nous aurions dû faire cela auparavant, y compris en 1995 ? Est-ce à dire, enfin et surtout, que nous pensons réellement que ces frappes aériennes vont dissuader et/ou empêcher tout nouvel attentat ?
Les frappes aériennes comme une potentielle offensive terrestre ne constituent pas une réponse globale. Une guerre, comme une offensive (terrestre ou autre) n’est pas une finalité politique. Juste un moyen. En ce sens, le choix de frappes aériennes définit l’objectif : non pas vaincre, juste contenir… ce qui est déjà quelque chose, mais en inadéquation avec les objectifs stratégiques. Un moyen devant permettre la mise en œuvre d’une solution / effet final recherché, soit dans le cadre préétabli, soit dans un nouveau cadre. On fait la guerre pour un devenir !
Voilà pourquoi, en Syrie et en Irak, rien ne se fera (et ne se fait) sans forces au sol… De là aussi, la nécessité impérieuse d’associer des puissances régionales : certes l’Iran que tout le monde cite, ou encore la Turquie, mais aussi l’Egypte.
E.I est une organisation née en Irak, qui s’est exportée en Syrie, puis répandue ailleurs du Maghreb à l’Asie. E.I est un projet politique révolutionnaire international, susceptible d’attirer à lui tout le monde. En ce sens, la problématique politique est autant chez eux (recomposition de la zone du PMO) que chez nous… de ce fait, il s’agit bien là, à l’œuvre, de transtensions mondiales remettant en cause « l’ordre mondial ». Un nouvel ordre va naître. Changement par le chaos et non pas les nouvelles croisades. E.I utilise un mythe et ces membres ne veulent pas être (plus être) les perdants de l’Histoire.
Ce qui se déroule actuellement en Syrie et en Irak, ne concerne pas uniquement ces deux pays, mais bien au-delà : le Proche et Moyen-Orient est en recomposition ; l’ensemble du monde arabo-musulman (appellation très impropre je le concède) est concerné ; l’Etat Islamique mais aussi des groupes comme Al-Nosra, sont dans un projet politique global avec de nombreuses ramifications. Refus de la modernité diront certains. Refus de notre modèle social, politique mais aussi économique (qualifié par eux de « barbare ») surtout bien avant des questions de religions. Question de souveraineté au sens de légitimité, tant individuelle que collective. Sorte de refus du « nous » que nos sociétés proposent au profit d’un « je » individuel devenant très vite un « nous » collectif pour une autre forme de société.
En Irak, en Syrie, en Libye, en Egypte mais aussi dans les zones tribales Afghano-Pakistanaises (un mouvement pro E.I émerge) les Etats traditionnels ont implosé dans une dynamique de recomposition à la fois territoriales (frontalières), sociétales et politiques (dans une logique d’agonie des différents régimes). Demain, d’autres pays seront concernés, en premier lieu l’Arabie Saoudite.
Face à des groupes djihadistes (Yémen, Mali, Nigeria, Afghanistan, Pakistan, Somalie, Libye, …) aux motivations multiples mais regroupés au sein d’un projet politique global, il nous faut nous adapter. Si nous avons su (partiellement) dans le passé faire face à des petits groupes variés, dispersés et géographiquement localisés ; nous devons appréhender la mouvance djihadiste adaptative actuelle de manière différente et elle aussi adaptative.
Sur le plan géopolitique, il nous faut d’abord donner des garanties aux populations diverses de la zone ; revoir avec l’ensemble des partenaires régionaux les problématiques frontalières, et travailler dans le temps long par le biais d’une diplomatie ambitieuse : c’est-à-dire ayant pour tâche de (re)nouer des relations difficiles et ne pas les refuser de prime abord.
Voilà pourquoi sans perspective de solution politique immédiate pour l’après E.I, notre combat militaire ne peut être que d’arrière garde : tenir la position et non pas de grande offensive terrestre. Tenir la position : renseignements toujours, cycle raccourci d’exploitations, frappes ciblées, politique assumée de décimation de l’ennemi (y compris lorsqu’ils sont de nationalité française ce qui risque de faire « tanguer » politiquement certains) et de ses chefs. Tenir la position, mais en étant assuré sur sa « vision politique », solide sur ses positions géopolitiques et morales ; affermit sur ses moyens, clair sur les conséquences de ses choix et actes, puissant sur sa volonté politique…

A se placer sur le plan du quotidien, on est vite périmé…


Sans doute la photo du garçon rendu par les flots est dramatique, et son impact émotionnel bouscule les classes exécutives européennes et françaises…. Et l’émotion devient politique. Depuis des mois la question lancinante des migrants – leur nombre, leurs naufrages dramatiques, les causes de leur départ – étalait aux yeux du monde l’absence de vision politique claire sur les événements en cours. Mais il est brutalement devenu impossible de fuir la réalité, le corps sans vie de ce petit garçon mort après tant d’autres, l’a signifié sans détour.

Politique intérieure avec les tweets et les déclarations d’indignation (PM, NKM, AJ, …dans une surenchère médiatique malsaine) ; politique extérieure avec une stratégie de la compassion ! Comme le dit Pascal Bruckner, la compassion c’est ce qui reste à une Nation quand elle a renoncé à tout le reste !!!!
L’émotion n’est que le paravent à notre faiblesse, notre renoncement, notre lâcheté (dans l’ordre : France / UE / Occident).

Une question : L’Europe est-elle (oui ou non) responsable de la mort de ce garçon ? Plus que les centaines de morts en Méditerranée des années passées ? Si nous sommes responsables et que nous voulons éviter à nouveau ce drame, une solution : un pont aérien et maritime pour aller les chercher et les transporter….. La réponse démontre immédiatement la puérilité du raisonnement.

Les solutions fleurissent en fonction des micros : quotas (ils ne régleront rien, diviseront les européens et constitueront un appel d’air supplémentaire), hot-spots (PM –cela doit sans doute faire « moderne »), campements d’accueil (PR – où ? quels pays ? combien ? ), rétablissement des frontières intérieures (à quoi cela servira ?– cf Hongrie), tris des réfugiés (PR), renforcer Frontex et créer un corps de garde-frontières européens (AJ) ; … La parole publique française est devenue totalement erratique, incompréhensible…. C’est un naufrage complet ! A se placer sur le plan du quotidien, on est vite périmé…

Nos politiques se lamentent sur Bachar El Assad mais oublient Issayas Affeworki (Erythrée) ou Omar Bashir (Soudan – et qui fait pourtant l’objet d’un mandat de la CPI). On veut frapper Daech que l’on devrait nommer impérativement Etat Islamique pour bien nommer l’ennemi (donc le comprendre) mais on se refuse à frapper Al-Nosra….

Il est tentant de faire de la lutte contre Daech ou contre Bachar l’Alpha et l’Omega de toute politique au PMO, mais cela ne résoudra rien ! Avec Daech, nous avons un projet politique (totalitaire, international et moderne). Ce n’est pas une organisation terroriste. Daech est une authentique force politique pratiquant à l’occasion le terrorisme.

Le Proche et Moyen-Orient n’est pas en décomposition. Il est en recomposition (ce qui n’est pas la même chose). Entendre l’exécutif français avoir comme ligne de mire le rétablissement des pouvoirs et des territoires hérités des accords Sykes-Picot (1916) démontre une incompréhension totale des événements. Situation identique en Libye, et dans une moindre mesure au Mali.

Honnêtement, que l’on intervienne ou pas, je ne suis absolument pas certain que cela fasse une grande différence au plan stratégique, tant l’absence de vision est patente.

Faire des missions de reconnaissance et ensuite des frappes aériennes en Syrie pour ne pas subir d’attentat (en filigramme ce que dit le PR dans sa conférence) ? Mais depuis un an, Daech subit des frappes aériennes…. Envisager des frappes aériennes en Syrie contre EI ne changera rien. Comme la loi sur le renseignement ne sert à rien ! Nous sommes dans la gesticulation… non vis-à-vis de nos alliés, mais de notre opinion publique. Il s’agit de montrer que l’on agit, que l’on décide…faute de savoir quoi faire.

Parce que nous n’avons pas de stratégie, pas de vision politique claire, notre exécutif lance des actions improvisées ; habiles manœuvres de communication voulant nous montrer qu’il y a quelqu’un à la barre…. La France a cessé d’être gouvernée. L’Europe est tétanisée.

Une campagne aérienne seule (reconnaissances + frappes) ne pourra détruire Daech. Pour détruire Daech, il faudra la conjonction d’une campagne aérienne (qui rend la concentration des forces adversaires difficile) et une offensive terrestre (qui attaque puissamment les forces adversaires dispersées).
Oui, en théorie, la destruction de Daech par une campagne militaire est possible : elle demandera au minimum 40 000 à 60 000 hommes fortement équipés, des mois de préparation et de mise en place. Les spécialistes militaires parlent d’un coût quotidien de l’ordre de 20 à 40 millions d’euros. Sur le champ de bataille, nous aurons face à nous des troupes entrainées, techniquement et tactiquement habiles, et fortement motivées. Les actions de Daech seront certainement décentralisées, s’organisant en essaim avec une volonté de faire des pertes (nos gouvernements y sont sensibles de crainte des opinions).
Nous devrons donc nous emparer méthodiquement de chaque localité et point d’appui dans un temps long. Aucune armée arabe n’est en capacité de faire cela. Seule, l’armée Française non plus.
La France a aujourd’hui une posture d’arrogance, car nous n’avons plus, ni les moyens financiers, ni militaires de notre posture. En fait, sans les américains, personne ne peut intervenir !

Une fois Daech détruit militairement, il faudra contrôler, sécuriser puis stabiliser le terrain tout en étant en capacité de poursuivre les groupes éventuels (et il y en aura)…. Le temps s’allonge à plusieurs mois, vraisemblablement plusieurs années…. Et pour la phase de stabilisation, les problématiques se démultiplient : les forces auxiliaires (Kurdes, milices chiites, tribus sunnites, …) et les forces « gouvernementales » qui auront aidées à l’offensive terrestre, s’opposeront les unes aux autres et s’opposeront toutes à nos forces.

Il nous faut reprendre l’initiative et renouer avec une véritable politique extérieure. Depuis 1976 (refus de la France de maintenir la protection des minorités d’orient), nous avons abondamment trahis nos engagements, multipliés les erreurs et les incohérences (cf Shah, cf Khomeiny, Cf Saoudiens, cf OLP, Cf Turquie, Cf Algérie, Cf Serbie, Cf les dictateurs arabes de Moubarak à Ben Ali en passant par Saddam Hussein ou Kadhafi sans omettre Hafez puis Bachar El Assad, cf Poutine).
Le Quai d’Orsay ne cesse de définir une politique diplomatique incohérente et la justifie sur la « morale » (laquelle ? la nôtre ? donc automatiquement la meilleure car par définition à portée universelle).
Retrouver alors la confiance (dans le temps long) de nos interlocuteurs vis-à-vis de nos intérêts, de nos ambitions, de nos initiatives.

Quelle stratégie ? note rédigée le 22 août pour un responsable politique


Quelques points importants :

– Le plus dur est devant nous. L’Etat Islamique (E.I) a décentralisé à l’extrême les cellules qui peuvent être désormais individuelles

– D’autres actions comparables sont à redouter. Avec l’attaque du Thalys, nous avons eu de la chance. Statistiquement, en raison du nombre croissant de volontaires prêts à s’en prendre à des cibles sur notre territoire, il est malheureusement fatal qu’un jour, un ou plusieurs tireurs, réussissent leurs missions.

– Ne pas se focaliser sur les détails mais se concentrer sur l’essentiel : nous ne faisons pas la guerre à des terroristes mais à un (des) groupe(s) pratiquant notamment le terrorisme.

– Nous ne devons pas céder à l’émotion ; même si elle est légitime.

– Être stupéfait aux dernières actions commises sur notre territoire, comme sur la violence déployée en Irak et en Syrie par E.I, c’est d’abord être ignorant du monde qui nous entoure et de l’histoire de l’humanité.
Décalage important entre une vision « occidentalo-centrée » (omniprésente dans nos sociétés et nos médias) et la vie réelle de la grande majorité de l’humanité.

– De ce fait, ces responsables tentent d’expliquer par des approximations et explications pathologiques les événements voulant masquer leurs incapacités à penser la violence intrinsèque du monde. De ce fait, nous montrons d’abord et avant tout notre propre faiblesse.

– De même notre exécutif (et nombres de responsables politique de droite, cf Ciotti, Etrosi ou Juppé) semblent incapables de relier entre eux les événements : on se félicite des révolutions arabes, puis on se plaint d’une région en décomposition… sans vouloir comprendre que les violences politiques –dont le djihad ne peut être déconnecté – au sein du PMO durant les 50 dernières années sont le signe d’une recomposition géopolitique.

– On fait la guerre pour obtenir un gain politique. Nos adversaires ont un but politique. Nous nous obstinons pour les vaincre de les ramener à la situation qui, justement, les faits nous combattre.

– E.I est bien une force politique. Il convient donc, non de la nier, mais de la comprendre, de la prendre en compte, puis de la traiter comme un ennemi… en lui faisant la guerre afin de lui imposer notre volonté. Mais ce sera dans un temps long. Pas en six mois.

– Nous sommes face à une organisation politique qui pratique notamment le terrorisme. Face à elle, le minimum c’est de nous battre. De mobiliser. De se mobiliser. Tous.

– A contrario des déclarations de notre exécutif sur la guerre en cours contre E.I, notre mode opératoire consiste en réalité à contenir et certainement pas à défaire l’ennemi. Il est illusoire de penser gagner la guerre avec de seuls moyens aériens. Ce faisant, les limites politiques que nous fixons à notre engagement démontrent la réalité et à la hauteur de nos ambitions…

– L’absence de résultats doit nous conduire à réévaluer notre posture et nous amener à définir précisément nos objectifs stratégiques au-delà de péroraisons verbales…
Certes, nous avons pour nous l’efficacité tactique, mais nous payons l’absence de réelle stratégie, en ce sens que nous n’avons aucune vision, aucun projet politique à proposer autre qu’une guerre sans fin.

– 1er objectif : Sécuriser, identifier, neutraliser les individus dangereux sur notre territoire (et hors territoire).
C’est l’essence des missions de nos services depuis de nombreuses décennies. Le terrorisme (quel que soit l’idéologie derrière lequel il se drape) va durer… constat établit dès les années 80 !
Pour ce faire, une politique claire de renseignements et de neutralisation qui n’a pas besoin de nouvelles lois mais de s’inscrire dans la durée (prendre la mesure du temps long)

– 2nd objectif : prendre la mesure des défis extérieurs auxquels nous sommes exposés.
o Pour la première fois, nous sommes engagés militairement simultanément sur plusieurs théâtres d’opérations envers la même mouvance, complexe et protéiforme.
o Comprendre le phénomène et donner du sens. Alors, vouloir peser sur la suite des événements.
o Remettre à plat notre politique de sécurité / défense / diplomatie et anticiper !
o Avoir une vision et un projet politique pour faire émerger une situation différente de celle que nous cherchons à maintenir (accords Sykes-Picot) qui pousse justement nos adversaires à recomposer la zone. (ce qui implique aussi de revoir nos alliances et la vision future de ces dernières…)

Victoire pour qui ?


Mon analyse « à chaud » de la situation issue du sommet de l’euro sur la Grèce. Je sais que je ne suis pas dans le ton…

La crise grecque est devenue une crise de l’Union européenne.

1/ pour que la zone européenne continue d’exister (démonstration même de l’accord du 13 juin), il faut des transferts massifs de capitaux ! Or aucun pays ne peut les supporter, y compris l’Allemagne (de l’ordre de 250 milliards d’euros par sur dix ans –en prenant comme base les « aides » à quatre pays du sud Italie, Espagne, Portugal et Grèce – soit de l’ordre de 8% de son PIB…

2/ le seul moyen de ralentir / diminuer ces transferts massifs a donc consisté en une politique d’austérité, entraînant une divergence de plus en plus forte entre économie des pays membres. C’est la fin de l’unité européenne…

3/ Crise du politique. Cette crise, ses atermoiements, (FH ne déclarait-il pas en 2012 que la crise grecque était désormais derrière nous ?) c’est aussi la crise du personnel politique (pas seulement des technocrates de Bruxelles). La perte de confiance des opinions (des peuples) envers les responsables politiques va s’accentuer. Et la faute n’en incombe pas à Alexis Tzipras…

4/ Victoire pour François Hollande ? Il est déjà en campagne pour sa réélection, oublieux de toutes ces promesses de campagne présidentielle de 2012, notamment celles de réorienter l’Union européenne…
Surtout, il s’agit d’une capitulation en rase campagne de la France face aux pays du Nord de l’Union européenne…. La France ne compte plus….

5/ les décisions prises ne régleront rien, ni pour la Grèce qui ne peut rembourser (et ce n’est pas un « reprofilage » de sa dette qui y changera quelque chose), ni pour la zone euro du fait de l’impossibilité des transferts massifs. Les décisions prises vont aggraver la situation. La dette grecque va donc, continuer de croître. Au moins, FH passera l’été tranquille.

6/ L’imposition de ces réformes, la mise sous tutelle de la Grèce, aboutit à une crise politique majeure « le gouvernement doit consulter les institutions [européennes] et convenir avec elles de tout projet législatif dans les domaines concernés dans un délai approprié avant de le soumettre à la consultation publique ou au Parlement ». Exit la démocratie…

C’est désormais l’implosion de l’Union européenne qui est possible. Et, le Premier Ministre français juge que notre Président a été à la hauteur de l’Histoire….